11/11/04 9.01 t.u. Christian Bouchet

Le Raïs Arafat est donc décédé.

Il avait 75 ans.

Je ne connais de son décès que les « raisons officielles » des communiqués des médecins militaires français.

Mais je lis aussi la presse non-conformiste, aussi bien « papier » qu’« en ligne », qui diffuse nombre d’informations non-officielles et occultées.

J’y ai relevé un article de Claude Léostic qui a séjourné au siège de la présidence palestinienne.

Il nous y compte ce que furent les dernières années d’Arafat :

« Ceux et celles d'entre nous qui l'ont rencontré à la Muqata'a savent les conditions inacceptables où il est réduit par les autorités d'occupation israéliennes depuis décembre 2001.

Pendant l'opération militaire du printemps 2002, les soldats israéliens ont tenté de pénétrer dans ce qui était la chambre et le bureau de Yasser Arafat. Des combats violents avec la garde présidentielle, la Force 17, les en ont empêchés. Les bombardements qui ont suivi ont partiellement détruit les bâtiments. En juin 2002 une autre attaque par chars et hélicoptères de combat israéliens a amplifié les destructions, réduisant le complexe à un champ de ruines.

Depuis, dans un bâtiment dont la sécurité a été très renforcée mais reste désespérément fragile, le président Arafat vit dans des conditions précaires en termes sanitaire et de sécurité. La fenêtre du bureau où il passe ses journées ne peut être ouverte sans danger (elle ne l'est donc pas) et il manque d'air et de lumière. Au cœur du bâtiment il dispose d'une chambre minuscule sans fenêtre, mieux protégée que son appartement officiel, que l'armée israélienne avait directement bombardé.

Sortir du bâtiment ? Il peut, mais en prenant des risques considérables, car les soldats israéliens n'ont pas quitté Ramallah, des snipers se postent souvent sur le toit de certains des bâtiments proches de la Muqata'a. Il lui arrive par beau temps de prendre un court moment de repos, entouré de ses proches et très protégé par la garde présidentielle, dans la cour /parking du complexe.

Vous imaginez un président contraint de sortir sous haute protection, dans la cour de son « palais », sous la menace latente de l'occupant de son pays dont des tireurs d'élite sont postés en embuscade ? »

Et Claude Léostic remarque avec justesse : « Qui, dans ces conditions, resterait en bonne santé ? Après une vie de combat, de privations, et à 75 ans… La responsabilité du gouvernement Sharon est totale dans la situation actuelle. »

Et on ne peut passer sous silence certaines déclarations d’officiels palestiniens.

Ali Kazak qui dirige la délégation palestinienne en Australie a déclaré au quotidien Herald Sun de Melbourne : « Les docteurs ne savent pas ce qu’il a mais ils croient qu’il s’agit d’un poison. Ils ont tout vérifié et son corps est en excellente santé, il n’a pas de cancer, ce n’est pas une leucémie».

Ashraf Kurdi, le médecin personnel d’Arafat a également déclaré à la chaîne de télévision satellitaire Al-Jazeera «Arafat est en parfaite condition, ce qui rend l’empoisonnement une très forte probabilité».

Un tel empoisonnement ne serait pas une première et on lui connaîtrait au moins deux précédents effectués par le Mossad (celui de le Dr. Wadia Hadad - Commandant en chef des opérations du FPLP et responsable de l’opération Entebbe – à la fin des années 1970, celui de Khaled Mashaal, le chef du bureau politique du Hamas à Amman (Jordanie), cible d’une tentative d’assassinat avec des agents chimiques le 25 septembre 1997 ). Deux précédents connus et prouvés, sans compter tous ceux éventuels qui n’ont pas été identifiés.

Quoiqu’il en soit, mort naturellement, du fait de l’adversité ou réellement assassiné, Yasser Arafat n’est plus.

Comme on peut le lire sur le site israélien du Gush Shalom, « la stature d'un dirigeant ne se mesure pas seulement à l'importance de ses réalisations mais aussi à l'importance des obstacles qu'il a eu à surmonter. Dans ce domaine, Arafat est sans équivalent dans le monde. Aucun autre dirigeant de notre génération n'a été confronté à des expériences aussi cruelles et à de telles adversités. »

Oui Arafat fut grand, même s’il n’a pas connu la victoire.

Il semble bien que dans l’immédiat son décès arrange tout le monde et que les puissants espèrent que son successeur sera plus « docile », qu’il acceptera le « mur de la honte » et qu’il se cantonnera dans un rôle de chef d’un bantoustan. Il est plus que probable que les candidats à cette fonction ne seront, de surcroît, pas rares car le fait d’être Palestinien n’exonère pas du fait d’être « humain, trop humain ». Mais si les dirigeants peuvent s’acheter, on n’achète pas tout un peuple. La lutte du peuple irakien le prouve actuellement. Au Proche-Orient le feu de la résistance n’est de toute évidence pas prêt de s’éteindre.

Où qu'il soit enterré dans les jours qui viennent, le moment viendra où la dépouille mortelle d’Arafat sera inhumée, comme il l’a souhaité, dans les lieux saints de Jérusalem par un gouvernement palestinien libre, représentant non pas un Etat croupion mais toute la Palestine libérée.

Christian Bouchet