
Expédier Chirac au tapis, oui c’est possible
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28/09/04 |
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2.24 t.u. |
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Roland Gaucher |
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La bataille pour ou contre l’Europe conçue par Bruxelles est engagée. Elle suscite dès maintenant de sérieux remous, qui ont pris, après le « non » de Fabius, une dimension médiatique.
Dans les sondages, le « oui » a été récemment donné à 51 %. Une tendance très fragile. Ce score était toutefois antérieur à la claque que viennent de subir et Chirac et Raffarin. Selon Le Journal du dimanche (édition du 19 septembre), le premier recueille 43 % d’opinions favorables (contre 49 % en août). Cela ne va pas mieux pour Raffarin : 31 %, contre 38 %. A noter que ces deux scores, très fâcheux pour les deux hommes, ne font l’objet, dans Le Figaro du lendemain, que d’un écho de 19 lignes en page 7 !
Ceci au moment ou Fabius soulève une très grave crise au sein du Parti socialiste sur l’Europe, en prenant position pour le « non ».
Essayons de faire le bilan du « non » à gauche. C’est la ligne du PCF. Les trotskistes sont également pour celui-ci. Les Verts sont plus divisés. On peut estimer que les « non » de l’extrême-gauche se situeront entre 7 et 10 % des voix.
L’évaluation est plus difficile à faire au sein du Parti socialiste parce que la bataille ne fait que commencer. Il est encore trop tôt pour savoir qui l’emportera au sein du PS entre Fabius et Hollande. Mais on peut estimer que le premier est susceptible de rallier entre 15 et 20 % des électeurs.
Passons maintenant en revue une partie de la droite et de l’extrême-droite. Il faut bien se souvenir que, lors du scrutin des Européennes, le Front national, en léger tassement, avait récolté 10 % des voix et le parti de de Villiers 7 %.
Faisons l’addition des « non » pour des motifs différents de la gauche, de l’extrême-gauche, de la droite et de l’extrême-droite. Nous aboutissons à un score qui se situe entre 39 et 47 % des voix.
A partir de là, la victoire des « non » - pour des motifs tout à fait différents - est parfaitement possible.
A quelles conditions peut-elle être acquise de façon sûre ? Il suffirait que Le Pen et de Villiers signent un manifeste commun contre l’Europe de Bruxelles, et que celui-ci soit affiché dans toutes les communes. Cela provoquerait un choc dans la grande masse des abstentionnistes.
L’intérêt de cette opération, à mes yeux, ne concerne pas essentiellement l’Europe, mais Chirac. Celui-ci, après un pareil revers, perdrait toute chance d’être réélu aux prochaines présidentielles.
Ce type d’opération, réunissant dans une brève mais très importante période l’extrême-gauche, la gauche, la droite et l’extrême-droite, s’appelle dans le vocabulaire marxiste-léniniste : l’alliance objective.
Qu’est-ce qu’un allié objectif ? Dans le vocabulaire et la praxis marxiste-léniniste, c’est un ennemi de la veille, avec lequel on fait un bout de chemin. Après quoi, on l’expédie au Goulag ou on lui loge une balle dans la nuque.
Mais, entre temps, on a gagné la partie. Et expédier Chirac dans les poubelles de l’Histoire, ce ne serait pas rien !
Cela écrit, je ne me fais aucune espèce d’illusion au sujet d’une possible et très provisoire alliance entre Le Pen et de Villiers.
Le premier, si quelqu’un lui exposait ce projet, pousserait des rugissements. Le second tournerait de l’œil à la perspective de s’allier avec un « néo-nazi ».
C’est comme cela que l’on perd les batailles.
Roland Gaucher
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