Le centenaire de L’Huma
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27/04/04 |
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3.53 t.u. |
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Roland Gaucher |
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La rédaction de L’Humanité vient de publier un gros numéro hors série, avec des pages en couleurs pour le centenaire de cette publication, fondée par Jean Jaurès en 1904.
Dans la réalité, au cours de ces cent ans, il n’y a rien de commun, que le titre. On peut en effet distinguer, au cours de ce siècle de publication, au moins deux périodes : celle de Jaurès, puis celle du ralliement de la rédaction au parti bolchevik, de Lénine, puis de Staline.
Autrement dit, L’Humanité a été dans une première période l’organe d’une tendance socialiste. Elle a été ensuite une publication « bolcho » entièrement inféodée au PC moscoutaire et donc totalement solidaire de la tyrannie et de la répression - répression qui, en Union soviétique, a fait plusieurs dizaines de millions de morts, dont on ne parle pour ainsi dire jamais, non seulement dans L’Huma, mais aussi dans la quasi-totalité des médias occidentaux, contrairement aux six millions de morts des camps de concentration nazis.
Pour ce qui est de L’Humanité bolchevik, je la lis chaque jour depuis un demi-siècle, parce que je lis toujours en premier le journal de l’ennemi (je ne dis pas : l’adversaire).
J’ai appris à la décrypter à l’école d’anciens bolcheviks : ils s’appelaient Henri Barbé, Pierre Célor, Pierre Dutilleul, Emile Bougères. Les deux premiers avaient été membres du secrétariat collectif du PCF entre 1928 et 1932, en compagnie de Jacques Duclos, de Maurice Thorez et d’un cinquième dont j’ai oublié le nom. Pierre Dutilleul, pour sa part, sera par la suite un des dirigeants du Parti populaire français de Jacques Doriot ; quant à Emile Bougère, dasn les années trente, il s’occupait d’une page spéciale consacrée aux entreprises. Cette page servait en réalité de couverture à un réseau spécial d’espionnage industriel, le réseau des « robcor » (abréviation du russe Robotniki correspondanti = correspondants ouvriers), dont le principal responsable était un Balte surnommé « le général Muraille » et dont l’identité exacte reste à ce jour - du moins à ma connaissance - inconnue.
Il va de soi qu’on ne trouvera dans le Hors série qui vient de paraître aucune trace de ces faits. D’une façon générale d’ailleurs les articles qui y figurent sont plutôt des résumés que des extraits.
Un exemple : à la mort de Staline, L’Huma publia en première page ce titre : « Le cœur immortel de Staline a cessé de battre ». Bien sûr cette une exceptionnelle n’est pas reproduite. Bien d’autres exemples seraient à citer.
L’aspect principal reste que parler d’un centenaire de L’Huma est un mensonge. Il y a eu, en réalité deux Huma, celle de Jaurès, qui vivait de ses lecteurs et de ses abonnés ; puis celle du PCF qui vécut... en grande partie du fric soviétique !
On peut compter sur nos médias pour ne pas évoquer cet aspect.
Roland Gaucher
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