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Dimanche, 3 Août 2003
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L'Art dans le IIIème Reich : 1933-45
Tomislav Sunic
Histoire :: Allemagne
Dès que l'on parle d'art plastique ou d'art figuratif en Allemagne pendant la période de 1933 à 1945, on est censé faire mention des ouvrages culturels ou pseudo-culturels qui marquèrent l'époque nationale-socialiste. L'art, au cours de cette brève periode troublée, s'inscrit dans l'histoire moderne européenne et, par conséquent, il doit être vecu ou ressenti dans le cadre géopolitique de l'Europe tout entière.

Nazisme et culture, cela a toujours été un sujet délicat, surtout aujourd'hui que fait rage la guerre médiatique entre soi-disant anticommunistes et antifascistes. Si l'on part du constat généralement accepté, que le nazisme fut une forme de totalitarisme, on se demande avec justesse si, en effet, il a existé une culture sous le IIIème Reich. Certains parallèles peuvent et doivent être tracés entre l'effort artistique en URSS et en Allemagne nazie, puisque la culture dans les deux systèmes devait toujours être assujettie à une idéologie particulière. Un bref aperçu de l'art sous le IIIème Reich exige une bonne connaissance du cadre historique et politique de cette époque. Qui étaient, de quoi s'occupaient les artistes pro-nazis avant l'arrivée du nazisme au pouvoir ? Que sont-ils devenus, après la chute du Troisième Reich ? Il est indispensable de souligner qu'être artiste en Allemagne nazie n'impliquait pas toujours un esclavage aveugle devant les décrets politiques du régime, ni l'appartenance obligatoire au parti (NSDAP) au pouvoir. Pourtant, le fait d'exposer devant le grand public, entre 1933 et 1945, présupposait le respect du concept de la beauté défini par l'appareil nazi. Un grand nombre d'artistes connus ne furent nullement des sympathisants du régime au pouvoir, tout en sachant, néanmoins, quelles oeuvres ils pouvaient créer et exposer afin de ne pas tomber dans l'oubli.

A l'instar de nombreux artistes tels qu'on les rencontre dans tous les systèmes et depuis l'aube des temps, beaucoup d'artistes allemands pendant la période nazie furent de simples peureux ou des flagorneurs typiques qui avaient bien compris comment il leur fallait se plier au nouveau système s'ils ne voulaient pas être oubliés. Il n'y a là rien de neuf dans l'histoire européenne. Etre un bon artiste ou un bon écrivain n'implique pas toujours d'avoir une intégrité morale, d'être du coté des opprimés ou de crier à la justice à hue et à dia. Au cours de toute l'histoire européenne il y a eu, et il y a encore, d'excellents artistes et penseurs qui servirent et servent encore les régimes criminels. Le grand sculpteur croate, très marqué dans sa jeunesse par Rodin, Antun Augustincic, réalisa des bustes du chef oustachi croate, Ante Pavelic. Il en fit aussi du maréchal communiste yougoslave Josip Broz Tito après la Deuxième Guerre mondiale. Par conséquent, s'interroger sur l'intégrité morale et politique d'Augustincic est une chose ; définir la subtilité de ses oeuvres artistiques en est une autre.

Ce que les deux régimes ont en commun est le rejet de "l'art pour l'art", donc le refus de l'esthétisme bourgeois, en faveur d'un art plus engagé et normatif censé servir d'outil à la création d'un "homme nouveau". En revanche, du point de vue thématique, stylistique et même esthétique, les différences entre l'art sous le communisme et l'art sous le nazisme étaient immenses. Après la Deuxième Guerre mondiale, et sous la pression des pays alliés, l'Allemagne dut ouvrir ses portes à l'art abstrait (Jackson Pollock, Piet Mondrian) et, dans une grande mesure, faire table rase de son art figuratif - même chez les artistes qui n'avaient pas adhéré au système hitlerien, et même chez ceux que celui-ci avait catalogués comme "entartete Künstler" (les artistes dégénéres). Un grand nombre de peintures et d'oeuvres d'art exécutées pendant le IIIème Reich finirent dans les poubelles après que plusieurs centaines de sculptures furent démolies ou détruites au cours des bombardements alliés. Après la guerre, un grand nombre d'oeuvres d'art furent saisies par les Américains « en raison de leur caractère pornographique » (!). Au printemps 1947, 8.722 peintures et sculptures d'artistes allemands furent transportées aux Etats-Unis, dont seulement un petit nombre fut retourné par la suite à l'Allemagne fédérale.

De plus, toute appréciation d'une oeuvre d'art créée pendant l'époque nazie exige une connaissance précise de la mentalité du peuple allemand, une bonne connaissance du Zeitgeist au moment de la création ou de l'avènement de telle ou telle oeuvre d'art. Ignorer les idées dominantes de la première moitié du vingtième siècle ne peut guère nous aider à saisir la portée artistique de telle ou telle oeuvre d'art.

Le grand peintre français Jacques David (1748-1825) servit avec dévouement trois régimes : les jacobins révolutionnaires, Napoléon et, plus tard, les monarchistes de la Restauration en France. David savait fort bien comment s'adapter au pouvoir, ce qui n'enlève rien à son don pour la composition statique et mobile, ni à sa touche de pinceau forte et réaliste.

N'est-on pas tenté de citer les centaines de cas similaires aujourd'hui, où les grands artistes et écrivains s'adaptent de nouveau au Politiquement Correct sans la moindre arrière-pensée ?

L'appareil politique au service de la culture

On oublie souvent que la propagande nazie avait pour but majeur, non le domaine du politique, mais celui de la culture. Cela était surtout vrai de l'art figuratif et de l'art plastique. Les quatre personnages les plus influents du Troisième Reich : Joseph Goebbels, Albert Speer, Arthur Rosenberg et le Führer, Adolf Hitler, se sont constamment penchés, durant les treize années du régime, sur le concept du nouvel art, de la nouvelle architecture et de la nouvelle peinture.

Dans sa jeunesse, au début du vingtième siècle, Hitler avait dessiné des centaines d'aquarelles, dont quelques-unes ont, sans aucun doute, une valeur artistique et semblent être fort appreciées de quelques antiquaires, surtout aux Etats-Unis. Vers la fin de son règne, en 1945, Hitler rêvait d'ouvrir la plus large galerie du monde dans la ville autrichienne de Linz. Les immenses efforts architecturaux, le lancement des premiers modèles d'automobile à usage populaire (Volkswagen), la construction d'autoroutes furent des idées de Hitler. Dans sa réponse au rédacteur en chef du journal culturel "Kunst dem Volke" du 2 juin 1937, Hitler écrivait que : "le fait d'avoir peint des tableaux pour pouvoir survivre ne veut pas dire qu' ils sont maintenant dignes
d'être exposés à la 'Haus der Deutschen Kunst' (Maison de l'Art allemand)."

Adolescent imprégné de romantisme, Hitler avait subi l'influence non négligeable de l'aquarelliste Rudolf von Alt et du peintre Carl von Spitzweg. Sous le régime nazi, de nombreux journaux culturels furent lancés: Kunst der Nation, Kunst dem Volke, Die Kunst im Dritten Reich, etc. En 1937, le ministre Goebbels créa une Chambre de l'Art ("Kunstkammer") qui, de 1935 à 1937, compta plus de cent mille membres. Au cours de la période 1933-1945, trente grandes expositions avaient lieu chaque mois en moyenne, et ce même dans les années 1940-1945 où l'Allemagne était l'objet de bombardements réguliers de la part des Alliés. En 1937, l'ouverture de la "Haus der Deutschen Kunst" eut lieu à Munich ; c'était à l'époque l'établissement réputé le plus important du genre en Europe. La première pierre de cet édifice - qui mesurait 175 metres de long - fut posée par Hitler lui-même. Environ mille artistes allemands y exposèrent leurs oeuvres de 1937 à 1939.

La postmodernité archaique

Les chefs nazis consacraient beaucoup d'énergie à la promotion des sculpteurs allemands, surtout en matière de création et d'exécution de bas-reliefs, de sculptures en bronze ou en pierre. Leur but politique était évident : exercer un rapprochement entre l'art allemand et le peuple allemand de sorte que tout Allemand, quelle que fût la couche sociale à laquelle il appartenait, pût s'y identifier. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si l'art allemand de cette époque témoigne très largement d'un retour vers le classicisme. Les modèles de l'Antiquité et de la Renaissance furent en quelque sorte transposés à l'Allemagne nazie. De nombreux sculpteurs travaillent avec ardeur tout en bénéficiant du soutien logistique de l'appareil politique. Leurs statues ressemblent, soit par leur forme, soit par leur composition, aux oeuvres de Praxitèle ou de Phidias, de la Grèce antique, ou à celles ciselées par Michel-Ange pendant la Renaissance. Les sculpteurs les plus en vue de cette période étaient Arno Breker, Josef Thorak et Fritz Klimsch qui, bien que jouissant d'une importante aide logistique de l'appareil nazi, n'étaient pas membres du NSDAP.

Ce qui frappe dans les sculptures et les bas-reliefs, qui pour la plupart sont des oeuvres monumentales, c'est la nudité feminine et masculine, dans une pose soit réelle, soit mythologique.

Le surhomme en politique devait trouver sa place surhumaine en culture plastique. Les sculptures d'athlètes, de guerriers, de nymphes et de déesses étaient exposées, non seulement dans des galeries, mais aussi au bord des autoroutes, devant les ministères, les casernes, etc. Même un ignorant de l'art peut se rendre compte que tous ces bas-reliefs et ces sculptures étaient chargés d'un message normatif et non réel. Soit par la morphologie du corps, soit par l'expression du visage, l'oeuvre plastique de cette époque mettait en exergue l'archétype de "l'homme nouveau" européen, avec toutes ses qualités imaginaires : tête nordico-dolichocéphale, bras et armes gothiques et dressés et, bien entendu, défi dinaro-alpin dans le regard. Les sculptures de femmes nues, telle "Flora" par Breker, "Jeune fille" par Fehrle, ou "le Regard" par Klimsch, montrent de trop belles femmes géométriques qui, parfois, avec leur corps parfait, aux chevilles étroites et allongées, aux seins ronds et bien mesurés, peuvent fatiguer l'observateur. Par ailleurs, le fait que de nombreuses sculptures montrent des accouplements féminins ou masculins témoigne que le nazisme n'était nullement un mouvement à tendance "conservatrice" et que la pudibonderie puritaine et anglo-saxonne lui était totalement étrangère. Personne ne peut nier le grand talent de Breker ou de Klimsch, même si certains critiques estiment avec justesse que leurs sculptures sont de solides copies artisanales des grands maîtres classiques et qu'elles ne représentent donc rien de neuf.

Adolescent, Arno Breker séjourna longtemps en France où il subit l'influence de son futur ami le sculpteur Aristide Maillol. Après la guerre, de nombreuses sculptures de Breker furent détruites par les soldats américains qui pillèrent son atelier. Il se consacra alors à l'exécution des bustes de ses amis et de ses protecteurs (Salvador Dali, Hassan II, Louis F. Céline, etc.). Il est à noter que Breker fut sollicité par les Soviétiques pour poursuivre sa carrière en Union sovietique - ce qu'il refusa. Mais il est possible de tirer un certain parallèle entre le monumentalisme exagéré de l'art plastique en Allemagne nazie et celui de l'Union soviétique (les Prométhéens nus face à des partisans musclés et débraillés ou sans chemise !) même si la différence est souvent criante : dans les pays communistes, on ne trouve jamais de sculptures représentant des femmes et des hommes nus, ce qui vient à l'appui de notre thèse selon laquelle le communisme, si effrayant politiquement, était communisme, si effrayant politiquement, était essentiellement un système pudibond et conservateur.

Même aujourd'hui, on ne trouve jamais de représentation picturale ou plastique d'accouplements en Chine, à Cuba ou en Corée du Nord. Les sculptures de Vénus ou de nymphes faites par Breker ou par Thorak n'ont rien de provoquant, rien de pornographique ; elles ne suscitent jamais de phantasmes sexuels ou de rêves érotiques, comme c'est peut-être le cas avec les belles nues peintes par l'artiste italien Amadeo Modigliani. Sur les sculptures de femmes nues des artistes allemands on rencontre toujours un sourire énigmatique et aristocratique et le profond sens du tragique sur les visages, ce qui reflète, peut-être, le pessimisme de toute une nation à la recherche de son identité géopolitique. Point de trace, non plus, de la coquètterie ou de la ruse féminine qu'on croise chez les belles nues des impressionnistes français, tels Gustave Courbet, Edouard Manet ou Paul Cézanne.

Le peinture allemande de cette époque constitue un chapitre à part.

Contrairement à une idée répandue, le "kitsch" n'a jamais fait partie de l'art en Allemagne nazie, et contre ce kitsch les autorités adoptèrent les mêmes mesures répressives que contre le prétendu art dégénéré. En ce qui concerne la peinture de cette époque, l'Allemagne a pourtant subi une considérable régression. L'expressionnisme fut complêtement abandonné ou bien mis en sourdine.

L'expressionnisme, par rapport à l'impressionnisme de provenance française, est paradoxalement le trait typique du caractère et du tempérament allemands ainsi que celui d'autres peuples germaniques (Flamands, Scandinaves). Or, les artistes expressionnistes allemands n'obtinrent pas l'autorisation d'exposer leurs oeuvres. Les écoles de pensée issues de Die Brücke ou de Neue Sachligkeit qui, au début du XXème siecle, avaient fourni à l'Europe entière de grands maîtres, se trouvèrent frappées par la censure.


Les artistes allemands qui entre 1933 et 1945 atteignirent à une certaine réputation étaient surtout des autoportraitistes néo-classiques et des paysagistes évitant toute pathétique exagérée et, bien entendu, faisant table rase de toute influence du cubisme et de l'art abstrait. On ressent dans une large mesure le renouveau du goût pour l'art primitif et le retour vers les maîtres flamands du XVème siècle.que sur les toiles de peintres soviétiques on aperçoit toujours des paysans et des ouvriers au large sourire et, en toile de fond, une usine ou un chantier, chez les peintres allemands les traces de l'industrialisation sont rarement perceptibles. L'asphalte, les cheminées qui brûlent, les usines en pleine construction, qu'on les observe chez les peintres réal-socialistes (et dans leur forme titanique et apocalyptique chez les artistes futuristes en Italie fasciste !), n'apparaissent jamais dans la peinture allemande de cette époque. De même que, si l'on compare les sculpteurs allemands aux sculpteurs sovietiques, on note également une différence énorme entre l'art figuratif sous le communisme et l'art figuratif sous le national-socialisme. Les scènes de belles nymphes paysannes abondent (Amadeus Dier, Johannes Beutner, Sepp Hilz, etc.). Ces belles nues rustiques que nous observons sur les toiles exhalent la concorde familiale et le repos bien mérité après un dur labeur champêtre. On retiendra le grand artiste et graveur sur bois, Ernst von Dombrowski, dont les scènes de vie paysanne et de jeunes enfants en train de jouer sont toujours fort prisées.

En guise de conclusion, on peut dire que la sculpture allemande de cette époque, en règle générale et normative, porte la symbolique de l'hygiène raciale et prométhéenne, tandis que les toiles de la même époque nous font découvrir une nette tendance populaire et naïve (völkisch) qui ne se prête guère à une instrumentalisation à des fins politiques.

Ce texte qui nous a été transmis par monsieur Tomislav Sunic a précédemment été publié en français dans le n° 645 d’Ecrits de Paris (juillet-août 2002)

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