Accueil ACTU Politique Fusion des départements : du grand n'importe quoi ?

Fusion des départements : du grand n'importe quoi ?

Le département des Hauts de Seine envisage de fusionner avec celui des Yvelines. Déjà, certains services sont en cours de rapprochement. Si les deux départements sont limitrophes, cela ne suffit pas à justifier ce projet dont l’objectif est avant tout basé sur des affinités politiques.

Or, un projet qui dépend des équilibres politiques actuels, par définition précaires, et qui pourrait être invalidé par un changement de majorité départementale n’est pas un bon projet. Il ne repose pas sur la logique des territoires mais sur la logique provisoire des accointances politiques.

En outre, un département ne peut pas fusionner dans son coin sans tenir compte de l’équilibre global de sa région, en l’occurrence de la région parisienne. Enfin, les Hauts de Seine sont dans la première couronne, tandis que les Yvelines relèvent de la 2e couronne. Seules quelques communes de la 2e couronne, encore appelée grande couronne, relèvent de la récente Métropole du Grand Paris. Ce qui pose un problème de cohérence. Soit le Grand Paris est autre chose que la région Ile de France et il doit être limité au 92, 93, 94, et 75, soit il ne correspond à rien. La fusion Hauts de Seine et Yvelines accentuerait l’incohérence du Grand Paris tel qu’il se construit.

grand parisEn matière de départements et de régions, si des restructurations sont possibles, elles ne peuvent être faites chacun dans son coin et à des rythmes différents. Les réformes doivent être un ensemble, elles doivent avoir une cohérence globale ou bien elles sont pires que l’absence de réformes. La réforme de 1964 supprimant le département de la Seine était contestable sur le fond mais avait le mérite d’une cohérence. C’est que l’Etat existait encore en France et donnait un cadre. C’est que l’Etat avait encore des serviteurs dignes de ce nom et considérés comme tels.

Nous n’en sommes plus là. Ainsi, la fusion des départements du Haut Rhin et du Bas Rhin et leur absorption dans la région Alsace, un temps envisagée et rejetée par référendum local, n’était pas une mauvaise chose en soi mais aurait dû se faire alors dans toutes les régions, les 22 régions alors existantes qui, moyennant quelques changements, constituaient un cadre correct de vie politique locale. Faite uniquement en Alsace, cette suppression des 2 départements était absurde. Elle impliquait des conditions qui n’étaient pas réunies. La principale était le mode scrutin des élections régionales. Si on supprime des départements avec un mode de scrutin par découpage du territoire (les cantons) pour ne laisser subsister que des régions avec un scrutin de liste, on perd tout l’échelon de la représentation des territoires, notamment ruraux. Il faut, d’une manière générale, maintenir des scrutins de circonscriptions en ajoutant une part de proportionnelle, de l’ordre de 25 % (on peut imaginer plus de 25 %, mais il faut alors une prime majoritaire).

localisation_communeToute réforme territoriale doit se faire 1) indépendamment des enjeux strictement politiciens susceptibles d’être bouleversés à une prochaine élection, 2) en fonction d’une taille humaine à trouver et préserver (il n’y pas de démocratie dans le gigantisme) 3) en fonction de la recherche du maximum de démocratie possible, celle-ci étant à la fois représentative, autant que nécessaire, et directe, autant que possible.

La création des macro-régions, que l’on doit à Valls et Hollande, est à l’opposé de ces exigences. Quant à la métropole du Grand Paris, il est à craindre qu’elle ne soit qu’un succédané technocratique de ce qui serait nécessaire, à savoir un Conseil fédéral du Grand Paris (Paris et les 3 départements alentours) laissant une large autonomie aux communes et visant des aménagements qualitatifs des villes et non le « développement » à tout prix de tout et n’importe quoi du moment que cela rapporte de l‘argent aux grandes entreprises. Aménager devrait d’abord être ménager.

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