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Pourquoi l’école française creuse les inégalités sociales

Une étude du Cnesco pointe l’échec de l’éducation prioritaire dans la résorption des inégalités sociales.

C’est une tragédie nationale : alors qu’elle est censée être un vecteur de la lutte contre les inégalités sociales, l’école française contribue au contraire à les aggraver, dévoile une étude du Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) publiée ce mardi.

Fruit du travail de 22 équipes de chercheurs français et étrangers, cette étude fait voler en éclats le mythe de l’école républicaine et sa promesse de méritocratie. Car, si l’école hérite d’inégalités familiales, elle en produit également « à chaque étape de la scolarité » des élèves qui « se cumulent et se renforcent », insistent les auteurs.

Recul du niveau des élèves défavorisés

Ces inégalités empruntent plusieurs formes : les « inégalités de traitement dans les ressources d’apprentissage dont les élèves disposent réellement à l’école, inégalités dans leurs résultats scolaires, inégalités sociales dans les orientations, dans les diplômes et même dans le rendement des diplômes sur le marché du travail. »

« Le poids de l’origine sociale des élèves sur leur réussite scolaire est bien plus important chez nous que chez nos voisins +comparables+, et (ce poids, ndlr) s’est aggravé sur un temps très court », constate le sociologue Georges Felouzis, qui a participé à ce rapport.

Bilan : la France est selon le Cnesco le pays le plus inégalitaire de l’OCDE et fait partie de ceux dont le niveau des élèves défavorisés a le plus baissé entre 2003 et 2012.

L’écart entre les résultats des élèves issus de l’immigration et les natifs s’est notamment creusé, même si « les performances scolaires sont de moins en moins liées à la position sociale et à l’éducation des parents chez les élèves issus de l’immigration », souligne le Cnesco. Une évolution qui « pourrait s’expliquer par un contexte scolaire nouveau marqué par un phénomène de discrimination négative. »

« Effets pervers » de l’éducation prioritaire

Les chercheurs expliquent les difficultés de l’école française par l’échec de l’éducation prioritaire, destinée à corriger l’impact des inégalités sociales grâce à des moyens renforcés. « Au départ pensé comme temporaire, le dispositif s’est étendu, les moyens se sont dilués, avec des effets de stigmatisation assez forts : dès lors qu’un établissement passe en éducation prioritaire, il y a une désertion des familles pour scolariser leur enfant dans un autre collège », résume Georges Felouzis.

Dès sa conception, les concepteurs du système de l’éducation prioritaire avait pourtant insisté sur ses possibles effets pervers et plaidé pour sa limitation dans le temps. Las. Trente-cinq ans plus tard, le nombre d’élèves concernés par cette politique n’a cessé de croître sans que cela n’entraîne une réduction des inégalités sociales, comme l’ont déjà démontré plusieurs études du programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA).

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« Au lieu de lutter contre la ségrégation, on dit qu’on donne plus de moyens, manière de la rendre plus acceptable moralement », estime Nathalie Mons, présidente du Cnesco.

Son organisme plaide ainsi pour un renforcement de la mixité sociale dans les 100 collèges les plus touchés par la ségrégation, une amélioration de l’orientation professionnelle, une meilleure implication des familles éloignées de l’école ou encore une renforcement des évaluations nationales aux étapes clés de la scolarité.

Les Echos

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