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Jacques Chirac et le nucléaire français
Christian Bouchet |
Éditorial
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Les déclarations de Jacques Chirac sur l’usage de l’arme nucléaire française (1) ont désagréablement surpris nombre des nôtres.
Non pas sur le fond, car il est juste et normal que nous soyons doté de l’arme nucléaire, que nous la développions et que nous soyons prêt à nous en servir.
Mais, cette intervention apparaissait à la première lecture, au mieux comme rien d’autre qu’un effet de manche où Jacques Chirac tentait, dans le cadre de problèmes politiciens internes, d’acquérir de nouveau une stature que des événements récents, autant que sa rivalité avec Sarkozy, n’ont cessé d’affaiblir, ou, au pire, comme un alignement sur la politique américaine au Moyen Orient, laissant supposer le rôle qu’accepterait de jouer notre pays dans une éventuelle intervention contre l’Iran.
C’est bien ainsi d’ailleurs que l’a compris ce pays qui par la voix du porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères Hamid Reza Asefi a jugé «inacceptables» les propos de notre président.
Mais sans doute faut-il voir plus loin que cela. Ainsi, même si nous n’en partageons nullement les conclusions, le texte de l’universitaire communiste Danielle Bleitrach « Danser avec le loup ou avec la meute » récemment mis en ligne sur divers sites anti-impérialistes est du plus grand intérêt.
Son analyse est la suivante : « Jacques Chirac refuse de se plier à l'impérialisme US. (…) Interpréter ce discours comme celui d'un Président français affaibli tant au plan intérieur qu'au niveau européen par les élections allemandes et la présence d'une chancelière atlantiste, plus proche désormais de Tony Blair sur la question de la vassalisation acceptée de l'Europe serait une erreur. C'est même le contraire, notons que si on peut toujours considérer que ce discours s'explique par des jeux internes avec Sarkozy, le point d'appui réel est au niveau international, en Europe, mais au-delà puisqu'il passe désormais aux yeux du monde pour le défenseur de l'altermondialisme, voir un écologiste. Sans parler de la Chine ou de la Russie, eux-mêmes à la recherche d'une stratégie alternative et au monde arabe. Ce discours n'est pas une offre de service à Bush, mais au contraire l'affirmation qu'il y a en Europe, un impérialisme concurrent capable d'agir de la même manière que les Etats-Unis mais qui, désire rester maître chez lui. Mieux il constate le déclin des Etats-Unis, leur incapacité à jouer le rôle auquel ils prétendent, donc il dit nous ne sommes plus au temps de l'Union soviétique, nous pouvons agir pour notre propre compte. Nous estimerons nos intérêts et les menaces au niveau européen, et la France possède les moyens nucléaires de son ambition. »
Il est vrai que lorsque l’on examine les réactions hostiles qui se sont manifestées on constate qu’elles proviennent principalement des rangs de la droite européenne et des atlantistes de gauche, en clair du Parti américain en Europe. Parti auquel Jacques Chirac ne dit rien d’autre que : « les USA sont en difficulté dans le monde et ils n'ont plus à protéger l'Europe de la puissance soviétique, les Européens peuvent donc agir pour leur propre compte et rester maître chez eux ».
Dans un tel contexte la déclaration de l’Ile longue prend un sens tout particulier : c'est un nouveau défi aux Etats-Unis et l'affirmation renouvelée du refus de les suivre. Les Européens, pour Jacques Chirac doivent agir pour leur propre compte....
La vraie question que pose alors ce discours est celle du réalisme d'une telle vision de l'Europe. Mais alors que l’esprit d’indépendance des Européens vis-à-vis des USA est bien affaibli tant par son récent élargissement que par les résultats électoraux en Allemagne, Jacques Chirac en digne héritier du général veut sans doute faire rappeler que rien n’est jamais fini et qu’aucun combat n’est jamais perdu.
Où il y a une volonté, il y a un chemin.
1 - S'adressant aux agresseurs potentiels - jamais cités - de la France, Jacques Chirac, lors d'une visite à l'Ile-Longue, a voulu ne «pas laisser planer le doute sur notre volonté et notre capacité à mettre en oeuvre nos armes nucléaires» en cas de menace contre nos «intérêts vitaux». Pour la première fois, il a mis en garde «les dirigeants d'Etats qui auraient recours à des moyens terroristes (…) La dissuasion nucléaire (...) n'est pas destinée à dissuader des terroristes fanatiques, appartenant à des organisations comme Al-Qaïda par exemple. Mais les dirigeants d'Etats qui auraient recours à des moyens terroristes contre nous» et «ceux qui envisageraient d'utiliser (...) des armes de destruction massive, doivent comprendre qu'ils s'exposeraient à une réponse ferme et adaptée de notre part». |
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