L’abjecte exploitation d’un abject fait divers
Un gang de criminels, s'auto-dénommant «le gang des barbares », après avoir entraîné un jeune homme dans un guet-apens au moyen d'une ruse, l'a enlevé et a demandé une rançon à la famille. Le malheureux otage a été torturé au point qu’il en est mort. Une fois le cadavre découvert, la police - qui n’avait pas été très efficace jusqu’alors -à très rapidement réussi à arrêter les criminels.
Très rapidement également, un formidable concert médiatique a transformé ce crime crapuleux en un acte antisémite, la victime étant de confession juive et sa mère étant une salariée d’une structure sioniste.
Contrairement à l'avis du Parquet, la juge d'instruction chargée de l'affaire – Corinne Goetzmann - a retenu l’hypothèse du crime antisémite.
Le corps politique dans son ensemble a suivi le pas et le président de la République, le Premier Ministre et ses ministres ont immédiatement officialisé leur indignation et ont même assisté personnellement à une commémoration religieuse pour le défunt. Une première manifestation regroupant des associations communautaires juives s'est déroulée à Paris, avec en parallèle des scènes de «ratonnade» anti-arabes organisées par des commandos de jeunes activistes juifs. Une autre manifestation, bénéficiant d'une couverture médiatique maximale, est prévue aujourd’hui. On y annonce la venue des présidents du Sénat et de l’Assemblé nationale, d’au moins six ministres et des dirigeants de presque tous partis politiques français.
L’homme de la rue, le français moyen, ne peut être que sidéré par tout cela quand il regarde le JT ou quand il lit le journal.
Il ne peux s’empêcher aussi de faire des comparaisons.
Sensiblement à la même date, un gendarme français a été tué sur l’île de Saint Martin dans des circonstances qui ne laissent aucun doute sur leur motivation raciste. Il n’y a pas eu pour lui d’émotion médiatique ou de manifestation. A son enterrement, il n’y a pas eu de Chirac, de Villepin, de Sarkozy ou de Baroin ; et pas de ministre de la Défense. La famille, la Gendarmerie et l'Armée étaient seules, négligées par l'Etat...
Durant les émeutes du troisième trimestre 2005, il y a eut plusieurs décès pour lesquels la connotation raciste était évidente. A ces occasions là non plus, aucune manifestation particulière n’avait eu lieue.
Alors comment ne pas en conclure, une fois de plus, que tous les citoyens ne sont pas égaux aux yeux de ceux qui nous dirigent. Qu’il y a nous et « eux », le vulgum pecus et les élus.
Comment ne pas constater aussi que ce fait divers est instrumentalisé pour des raisons de politique intérieure et étrangère évidente. Ce n’est pas par hasard si Le Figaro remarque : « Face à la montée d'un fanatisme qui n'épargne pas la France, le Premier ministre et le président du CRIF ont décidé de faire front commun. L'atmosphère au dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives aura rarement été aussi consensuelle». Ce n’est pas par hasard non plus si Julien Dray - dont il faut se souvenir que le frère fut un dirigeant du Betar - dénonce l’influence de Dieudonné derrière l’antisémitisme qui aurait tué Ilan Halimi et que Roger Cukierman – le dirigeant du Crif de France – évoque l’« antisémitisme » du Front national. Ce n’est pas un hasard encore si les médias évoquent la Palestine et l’Irak parmi les modèles ou les motivations du « gang des barbares ».
L’assassinat d’Ilan Halimi fut abject, son exploitation politique et médiatique l’est encore plus.