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Mardi, 28 Juin 2005
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Etre riche n'est pas un péché pour les juifs
TelQuel Magazine
Impérialisme :: Entretiens
Le texte qui suit est un entretien avec Jacques Attali réalisé pour le journal marocain TelQuel Magazine N° 180 par Mehdi Sekkouri Alaoui

Journaliste, écrivain, banquier, humaniste, conseiller présidentiel…vous portez de multiples casquettes. à laquelle vous identifiez-vous le plus ?

Je ne souhaite pas choisir. Comme je ne suis pas sûr de vivre plusieurs vies l’une après l’autre j’essaie de les vivre simultanément, et surtout de faire en sorte, comme chaque humain devrait le faire, que le monde soit un petit peu meilleur après moi qu’avant moi. J’essaie de le faire de toutes les façons possibles, soit à travers l’action soit à travers des réflexions. J’ai toujours pensé que réfléchir sans agir, c’était un peu lâche. Je crois que cette dualité entre l’action et la réflexion est nécessaire pour aider un tout petit peu le monde à être différent.

Comment se fait-il que dans l'imagerie populaire de beaucoup de pays, les Juifs sont assimilés au pouvoir, à l’argent, à l’avarice...?

Cette assimilation revient aux antisémites. Les Juifs à travers l’histoire, ont été tout aussi pauvres que les autres, mais ils avaient à l’égard de l’argent deux attitudes particulières. Premièrement, ils ont toujours considéré que l’argent devait être utile pour aider les autres. Alors qu’il est scandaleux pour les chrétiens d’être riche, chez les Juifs ce n’est pas un péché. Deuxièmement, les Juifs ont été contraints, d’abord en pays musulman puis en pays chrétien, d'exercer des métiers d'argent, que personne d'autre n’avait le droit de pratiquer. Le rapports des Juifs avec l’argent s’explique un peu comme leur rapport avec Dieu. Ils ont apporté à l’humanité le monothéisme et l'argent. De même que les chrétiens ont souvent essayé de se débarrasser des Juifs parce qu’ils ne voulaient pas qu'on soit monothéiste avant eux, de même avaient-ils envie de tuer leur banquier pour ne plus rien lui devoir. L’antisémitisme trouve donc sa source dans cette double ingratitude.

Puisque la richesse chez les Juifs sert à aider les autres et qu'on constate chez eux un attachement sentimental très fort pour leurs pays d’origine notamment au Maghreb, comment se fait-il, alors, qu’ils n’y investissent pas ?

Moi qui suis né en Algérie, je ne vois pas comment je pourrais y investir. Matériellement et juridiquement, c’est impossible. Quant au Maroc, ce qu’on peut regretter, c’est qu’il n y ait pas assez d’investissements étrangers, mais pas spécialement juifs. Il est vrai que dans la plupart des autres pays musulmans, les Juifs ne peuvent pas investir. Pour un Juif irakien, syrien, égyptien ou algérien, investir dans ces pays n’a pas de sens. Nous ne pouvons investir dans des pays où nous avons été spoliés.

Pour Marx, le Juif est la matrice du apitalisme, qu’en pensez vous ?

Marx explique que toute religion et donc le judaïsme est fondée sur la même idée que le capitalisme. L’ensemble de ces systèmes de valeurs est basé sur la même idée individualiste au détriment de l’idée collective. Pour lui, le seul remède à l’exploitation serait la disparition de la religion, supposée entraîner celle du capitalisme. Il a écrit cela, alors qu’il n’avait que 23 ans. On ne peut pas dire que ce soit son meilleur texte.

Vous annoncez la chute de l’Amérique, dernier empire sédentaire. à quoi doivent faire face les états-unis aujourd’hui ?

Il y a plusieurs forces qui sont nomades par nature et qui peuvent rivaliser avec eux. Il y a d’abord le marché, qui leur a été tellement utile, mais qui va commencer à jouer contre eux. D’ailleurs, ils commencent à se plaindre des délocalisations. Ensuite, il y a la démocratie. Ce que les A méricains lui demandent en premier, c’est le droit de circuler. En faisant la promotion d’une démocratie planétaire, ils se piégent eux-même. Et puis la troisième force, c’est l’islam qui, par nature, ne s’inscrit pas dans un territoire géographique donné et se déplace en exerçant une forte séduction.

Et selon vous qui, du marché, de la démocratie ou de l’islam va prendre le dessus ?

Mon pronostic, c’est qu’en tenant compte de ces différentes forces, c’est plutôt la démocratie qui, à terme, va gagner.

Vous faites souvent le parallèle entre la chute de l’empire romain et celle de l’empire américain. Cela a pris 4 siècles pour les Romains, quelles sont vos prévisions pour les Américains ?

Il y a deux hypothèses : ou les Américains se renferment sur eux- même, et là ils peuvent tenir très longtemps en demeurant une structure très forte mais seulement locale, ou alors, ils essaient de rester mondiaux, comme ils le font maintenant. Le dernier rapport confidentiel du Pentagone va dans ce sens, puisque la nouvelle stratégie de défense américaine consiste à s’étendre un peu partout dans le monde. C’est la stratégie pour laquelle avait opté l’empire romain.

Le projet du grand Moyen Orient, est-ce une opportunité pour le monde arabe ou de l’opportunisme, voire de l’impérialisme américain ?

Dans de nombreuses parties du monde, le marché et la démocratie, les deux valeurs dominantes aujourd’hui, ont été imposés. Il reste la région du Moyen-Orient. Donc, avancer l’idée à travers ce projet, que le marché et la démocratie doivent s’imposer dans cette région, est en somme tout à fait banal, puisque ça consiste tout simplement à faire ce que l’on a fait partout ailleurs. Le reste, ce sont des modalités, à savoir si c’est fait à l’irakienne ou à l’ukrainienne.

Le monde de cette région est-il préparé à ce que les mouvements de foule imposent la démocratie ?

Je ne sais pas. L’exemple iranien ne plaide pas dans le bon sens, puisqu’on a remplacé une dictature par une autre. Il faut craindre évidemment que ça soit la même chose.

Dans votre dernier ouvrage, vous évoquez la seule période de l’histoire durant laquelle les trois religions monothéistes ont cohabité. Qu’est-ce qui a entraîné la fin de cet âge d’or ?

Ce qui est formidable c’est que le seul endroit où ça marchait à cette époque se trouvait entre le Maroc et l’Andalousie. Cependant, l’empire andalou, au lieu de se construire politiquement, a utilisé le prétexte religieux, et c’est ce qui n’a pas marché. Ce n’est pas du tout par antisémitisme qu’ils ont chassé les Juifs et les Chrétiens. La religion n’est qu’un prétexte à des batailles politiques. Les Almoravides, puis ensuite les Almohades l’ont fait parce qu’ils n’avaient pas de ciment à leur projet politique autre que l’intégrisme religieux. Le religieux doit rester dans le champ du religieux. Le drame c’est quand le politique l’utilise.

Pensez vous que des pays comme le Maroc devrait aller vers la laïcité ?

Le Maroc est à mon sens, sur la voie de la laïcité, dans la mesure où le gouvernement actuel paraît s'orienter dans cette direction. Mais je pense qu'il pourrait aller plus loin et prendre davantage de mesures contre l’intégrisme tant à l’intérieur du Maroc qu’à l’extérieur pour que celui-ci ne gagne pas davantage de terrain. Sinon les institutions marocaines me paraissent parmi les plus solides dans le monde arabe pour protéger le pays de ces dangers-là.

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