Interview intégrale accordée au magazine VSD
Suite au dossier sur Dieudonné publié dans VSD ("Dieudonné, ses laisons (sic !) dangereuses", VSD n° 1437) et aux manipulations auxquelles il a immanquablement donné lieu, voici l’interview intégrale accordée par Alain Soral à la journaliste de VSD, en vue de ce dossier:
Pourquoi êtes-vous, encore aujourd’hui, solidaire du combat de Dieudonné ?
Je ne suis pas solidaire du combat de Dieudonné, mais de Dieudonné tout court ! Parce qu’on abandonne pas un homme dans la difficulté. Je trouve d’ailleurs votre question révélatrice d’un certain climat de lâcheté bien français, quand je pense à tous ceux qui le soutenaient et le soutiennent encore en privé, et qui le lâchent face à la pression des médias… Quant à son combat, c’est plus compliqué… mais ce n’est même plus le sujet puisqu’il ne s’agit plus, aujourd’hui, que d’abattre un insoumis par tous les moyens !
Considérez-vous qu’il est victime d’un lynchage et/ ou d’un lâchage médiatique excessifs ?
Si vous prenez la chronologie des faits, vous verrez qu’au départ il n’y a pas grand chose… juste un sketch fustigeant, sur un mode comique, des extrémistes d’un pays étranger… Ensuite le climat n’a fait que s’aggraver du fait que - sûr d’être du côté de la morale et du bien - Dieudonné a à chaque fois refusé d’abjurer, ce qui l’a mené de plus en plus loin. Beaucoup plus loin, j’en suis sûr, que là où, au départ, il voulait aller…
En fustigeant officiellement tous les communautarismes, son discours ne vise-t-il pas, selon vous, à aggraver les conflits inter-communautaires ?
La seule façon de ne pas aggraver les conflits inter-communautaires c’est de rappeler, à tous, les valeurs de la République qui ne reconnaît, dans la sphère publique, que des individus citoyens, et je ne pense pas que Dieudonné ait été le premier à donner le mauvais exemple ! À mon avis, il a juste voulu dire qu’au petit jeu de la prééminence victimaire, les africains pouvaient contester à d’autres la place peu envieuse de leader!
Si il avait été mieux écouté, et si les politiques avait fait leur devoir au lieu de céder aux pressions, nous n’en serions pas là. La lâcheté est toujours mauvaise conseillère.
Quant à la montée du communautarisme, elle découle logiquement du modèle américain et de la politique étrangère américaine actuelle, Dieudonné n’y est pour rien !
En quoi vous démarquez-vous ou vous démarqueriez-vous sur les propos tenus récemment par lui à Alger notamment sur les commémorations de la Shoah et sur le Crif ?
Je crois que le problème de Dieudonné, comme le mien parfois quand on me piège, est un problème de forme.
Dieudonné vient du monde du spectacle et il s’exprime parfois de manière abrupte - disons non politique - sur un sujet particulièrement sensible… Mais si vous réfléchissez, deux personnalités morales insoupçonnables, pour citer Jean-François Kahn et Alain Minc, ont récemment écrit sur le CRIF et son actuel président la même chose que Dieudonné.
Quant aux commémorations, un haut responsable de la communauté juive me faisait lui-même part, récemment, de ses doutes sur l’efficacité pédagogique de ce genre de mise en scène. Quel que soit le but moral poursuivi, la compassion ne s’exige pas plus que le harcèlement crée l’amour. La psychologie humaine est ainsi faite, là encore il s’agit surtout d’une question de finesse…
Pourquoi aviez-vous accepté de figurer dans le comité de soutien d’Euro-Palestine ? Pourquoi avez-vous décidé de partir ou vous en a-t-on exclu ? Pourquoi Dieudonné est-il parti ?
J’ai d’abord été flatté qu’on me demande mon soutien ! Et, vu de l’extérieur, aider à la résolution du drame palestinien me semblait une cause juste. Autre raison moins glorieuse, j’étais en pleine promo pour “Misères du désir", j’avais donc aussi besoin de me montrer…
Petite précision : on ne m’a pas exclu d’Euro-Palestine pour la simple raison que je n’en faisais pas partie ! J’étais juste signataire du comité de soutien comme Djamel et princesse Erika. Je m’en suis désolidarisé par un texte parce que, vu de plus près, cette organisation m’a semblé fort peu transparente et peu démocratique, pour ne pas dire louche. Je veux bien tendre la main, mais je veux savoir qui la manipule…
Dieudonné en est parti, je crois, pour les mêmes raisons.
Comment qualifiez-vous la relation qui vous lie à Dieudonné ?
Je la qualifierai d’imprévue.
N’oubliez pas que j’avais commencé par l’allumer dans une texte intitulé “Dieudonné et l’esclavagisme” (dans “Abécédaire de la bêtise ambiante"), texte où je démontrais qu’il avait plus de chance de descendre d’un marchand d’esclaves que moi ! Notre premier contact fut donc, à sa demande, pour discuter de ce texte qui l’avait interpellé. Je m’attendais à une rencontre tendue mais j’ai découvert un homme humble et ouvert au dialogue… Je qualifierais donc notre relation de “respect mutuel". Je respecte son courage et son talent - deux qualités qui vont rarement de paire dans le monde culturo-médiatique, vous avez pu le constater ! Sans doute est-ce la même chose pour lui. Ne dit-on pas que “les épreuves rapprochent” ?!
Partagez-vous son point de vue lorsqu’il dit :
” Etant donné que le Noir dans l’inconscient collectif porte la souffrance, le lobby juif ne le supporte pas, parce que c’est leur business” (interview sur Blackmap.com)” et lorsqu ‘il dit ” BHL est à la droite de Le Pen” ?
Sur la première déclaration, étant blanc de naissance et français moyen de situation, il m’est difficile de juger, mais en faisant un effort, il me semble comprendre ce qu’il peut ressentir… Sans doute un peu la même chose que je ressentais, lorsque jeune mâle pauvre, j’entendais à la télévision telle grande bourgeoise féministe se plaindre de l’oppression masculine ! Un sentiment d’obscénité qui me mettait hors de moi…
Quant à comparer BHL à Le Pen, je trouve ça un peu dur pour Le Pen. On a beau se méfier du bonhomme, personne ne mérite d’être traîner aussi bas !
Voilà mes réponses honnêtes et sincères à vos questions épineuses. Faites-en bon usage,
Alain S.
(10 au 16 mars 2005)
Source: alainsoral.com