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Samedi, 25 Décembre 2010
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Julius Evola (1898 – 1974). Retour sur un livre collectif et une émission
Daniel Cologne
Théoriciens :: Evola
Julius Evola (1898 – 1974). Retour sur un livre collectif et une émission
À l’heure où j’entame la présente recension, l’émission de radio est encore toute fraîche à ma mémoire et je commence donc par en dire quelques mots.

Hormis la jeune femme à la voix très agréable chargée de répercuter quelques interventions d’auditeurs et excepté Pascal G. Lassalle présent sur le plateau, les intervenants étaient des contributeurs de l’ouvrage collectif : Arnaud Guyot-Jeannin (l’animateur de radio), Georges Feltin-Tracol, Thierry Jolif (le maître d’œuvre du livre intervenant par téléphone), et votre serviteur (également par téléphone).

Fin connaisseur de l’œuvre et de la pensée d’Evola, Pascal G. Lassalle a couronné son gâteau de pertinentes remarques par une cerise en forme d’éloge du livre collectif, dont il a souligné et apprécié la « polyphonie ».

Thierry Jolif a brillamment retracé le parcours d’Evola. En fin d’intervention, il m’a fait l’honneur de trouver intéressante la perspective d’un utopisme de Droite et j’ai eu tort de ne pas rebondir sur ce propos durant mon temps d’antenne.

Georges Feltin-Tracol a rappelé que, dans Les Hommes au milieu des ruines, Evola s’est intéressé à l’entreprise et montré favorable à une certaine forme de cogestion telle qu’elle fut pratiquée en Allemagne après la Seconde Guerre mondiale. Rien de ce qui se passait en Allemagne n’était étranger à Evola, qui connaissait à fond ce pays, sa langue, sa culture et sa sensibilité socio-économique.

Auteur d’un remarquable texte sur la montagne, « un lieu élevé pour des hommes de race ! » (p. 178), ce dernier mot devant être évidemment pris dans son acception spirituelle, Arnaud Guyot-Jeannin s’est aussi révélé un excellent animateur de radio.

L’émission de Radio Courtoisie s’est déroulée dans le respect du rythme de chaque intervenant, aux antipodes de l’écriture audio-visuelle nerveuse qui domine aujourd’hui, loin des cacophonies entrecoupées de publicités envahissantes ou de musiques agressives, à cent lieues du brouhaha insupportable où les intervenants se coupent mutuellement la parole et où personne ne peut finalement aller au bout de son idée.

L’intervenant victime d’un trou de mémoire peut compter sur Arnaud Guyot-Jeannin pour venir à la rescousse, ce qui implique de la part de l’animateur une parfaite maîtrise de son dossier. Je suis confus de ne pas avoir moi-même cité la revue Totalité, première revue évolienne de langue française (1977), alors que la question et la réponse en cours concernaient mes activités des années 1970.

La « polyphonie » d’Evola envers et contre tous s’ouvre par une originale partition de Jean Parvulesco qui, dans le sillage du maître à penser italien, stigmatise les « préjugés » sur « l’occulte » véritable, « à savoir des forces supra-individuelles et non humaines » (p. 19). Nous sommes alors loin de la conspiration grossièrement imaginée par une fraction toujours trop importante de notre famille de pensée : le « grand complot » fomenté dans les loges maçonniques et les sociétés secrètes juives.

Viennent ensuite cinq entretiens avec Alexandre Douguine et Christian Bouchet (également auteurs de deux textes), avec Renato Del Ponte, qui a « assuré le transport et le dépôt des cendres d’Evola dans une crevasse du Mont Rose à 4 200 mètres d’altitude, à la fin d’août 1974 » (p.4 8), avec Robert Taylor, prédisposé à la découverte d’Evola par un parcours initiatique étonnant, et enfin avec Alain de Benoist, sur la contribution duquel je reviendrai plus loin.

Toutes les contributions d’Evola envers et contre tous méritent d’être lues. Je ne puis les évoquer exhaustivement, mais je me réjouis par exemple de la présence d’un représentant du protestantisme (le pasteur Blanchard), que Julius Evola (et René Guénon) ont eu tendance à balayer d’un revers de la main, sous prétexte qu’il est historiquement lié à la Renaissance et à l’Humanisme.

Préférant parler de « pérennialisme » plutôt que de « traditionalisme », Mark Sedgwick fait inaugurer ce courant par Marsile Ficin, grande figure du Quattrocento et fondateur de l’Académie platonicienne de Florence.

Si « humanisme » est synonyme d’« anthropocentrisme » et s’il consiste donc à placer l’Homme au centre à la place de Dieu ou des lois cosmiques, alors Evola et Guénon sont « anti-humanistes ».

L’invention de la perspective en peinture est sans doute à mettre sur le compte d’un certain anthropocentrisme, mais le critique d’art Francastel y a surtout vu une corrélation avec l’ouverture au monde non-européen : voyages espagnols vers l’Amérique du Sud, découverte du Canada par Cartier (1534), après celle du Brésil par Cabral (1500), périples portugais vers l’Asie via le contournement de l’Afrique.

Dans cet ordre d’idées, Evola et Guénon sont quelque part des « humanistes », car ils font porter le regard de l’homme occidental chrétien et de race blanche vers la Chine, l’Inde, le monde arabo-musulman, les civilisations précolombiennes, sans compter l’exploration des antiquités latine, grecque, égyptienne, persane, hébraïque, celtique, scandinave et babylonienne, vers lesquelles ils nous invitent à une empathie exempte de toute condescendance et de tout complexe de supériorité.

J’ai lu avec le plus vif intérêt le chapitre d’Alessandra Colla sur Métaphysique du Sexe, où le lecteur « trouvera d’excellents matériaux à méditer, dans le cadre d’une perspective élargie et non conventionnelle sur le thème toujours passionnant des rapports entre homme et femme » (p. 141).

Le thème du « sexe intérieur » devrait contribuer à extirper de notre famille de pensée le préjugé homophobe, tout aussi déplorable que la prévention raciste ou la réaction miso-islamique.

Certes, le port du voile (intégral ou non) est étranger à nos coutumes, mais la grande tradition européenne nous offre, avec l’amour courtois, une réponse autre que la laïcité féministe et égalitaire. Pourquoi certains d’entre nous, désireux de s’opposer à un modèle extra-européen importé, s’obstinent-ils, en matière de rapports homme-femme, à singer de façon désastreuse le discours d’une Élisabeth Badinter (en France) ou d’une Antoinette Spaak (en Belgique) ?

Christian Bouchet voit en Evola « un tantrika d’Occident » (p. 59) et David Gattegno nous convie à nous ranger sous « la claquante oriflamme » (p. 110) du penseur italien, dont Alexandre Douguine souhaite que l’on redécouvre « la dimension de gauche » (p. 68).

À côté de ces évoliens fidèles, mais non pour autant « aveuglés par la dévotion » (p. 57) et figés dans « un fidéisme dévot » (p. 82), Alain de Benoist et Thierry Jolif prennent des distances et rectifient des erreurs. Entonner d’inconditionnelles louanges serait un mauvais service rendu à une œuvre « essentielle », qui « appelle le dialogue et mérite une continuation » et qu’il faut « continuer à voir vivre » (Ibid.).

Le dialogue télé-radiophonique de Thierry Jolif et d’Arnaud Guyot-Jeannin ne fut pas dénué d’humour. L’animateur releva chez le maître d’œuvre l’emploi d’un mot anglais gentiment sanctionné d’une amende symbolique d’un euro, mais dans les minutes qui suivirent, l’éditeur d’Evola envers et contre tous utilisa un mot latin susceptible de lui faire regagner son obole dans le cochonnet de Radio-Courtoisie, station qui porte bien son intitulé, qui se veut porte-parole « du pays réel et de la francophonie » et où les auditeurs doivent savourer de très agréables moments d’écoute.

Mais c’est évidemment le concept de « bi-unité » qui constitue l’apport majeur de Thierry Jolif et dont on peut analyser l’analogie avec les dualités des domaines les plus divers : Soleil – Lune, Brahmane – Kshatriya, Dieux – Titans, État – Peuple.

Evola rappelle souvent la vieille légende andine des titans « qui ne connaissaient que la Lune » et furent pétrifiés par les « fils du Soleil » pour devenir les statues géantes de Tihuanaco, vestiges de la culture pré-inca de Bolivie.

Mais ailleurs, il persiste à attribuer le Soleil au Kshatriya et la Lune au Brahmane.

Certes, selon qu’on envisage dans le Brahmane le sage (aspect positif) ou le prêtre (aspect négatif), et dans le Kshatriya le héros (aspect positif) ou le guerrier (aspect négatif), on peut estimer que le héros est supérieur au prêtre et le guerrier inférieur au sage.

Toutefois, l’examen de la bi-unité de la Lumière ne laisse aucun doute. Le Soleil (dont la lumière est innée) est supérieur à la Lune (dont la lumière est reflétée). Le Soleil a besoin de la Lune lorsqu’il descend sous l’horizon pour que la nuit demeure éclairée. Le supérieur a besoin de l’inférieur, ce qui arrondit les angles d’une incontournable conception hiérarchique de la société prenant le cosmos pour modèle.

Le Soleil correspond à « l’homme de connaissance », le sage naturellement clairvoyant, tandis que « l’homme de puissance » lunaire a besoin de justifications spéculatives (de speculum, le miroir). Et qu’est-ce que la Lune, si ce n’est le miroir réfléchissant la lumière du Soleil ?

Reste à vérifier la validité des analogies Soleil – Lune et État – Peuple. Comme le souligne pertinemment Alain de Benoist, Evola manifeste souvent du mépris pour le peuple, qu’il confond avec la masse. Georges Feltin-Tracol tente de redonner une teinte solaire au peuple en l’assimilant au cocon de soie qui renferme la chrysalide (du grec krusos, l’or). Celle-ci serait symboliquement équivalente à l’État, principe viril qui devrait alors s’extraire du demos féminin. Mais dans ce cas de figure, on a une extraction inverse de celle évoquée dans la Genèse biblique et rappelée par David Gattegno, où c’est la femme qui est extraite de l’homme.

Bref, le débat reste ouvert. Puisqu’il vient d’être question d’Alain de Benoist, je conclurai en déclarant obsolètes mon attitude critique envers la Nouvelle Droite il y a trente ans, et surtout la focalisation de la polémique sur un homme dont l’énorme travail et la qualité intellectuelle méritent le respect.

Alain de Benoist écrit : « Je conçois l’histoire comme “ sphérique ”, non comme linéaire, que cette ligne soit perçue comme orientée vers un toujours mieux (comme dans l’idéologie du progrès) ou vers un toujours pire (comme chez Evola) » (p. 55).

Je partage ce point de vue. Chez Evola comme chez Guénon, derrière les cycles, on devine en filigrane, non la ligne courbe, non les spirales montantes et descendantes traduisant la respiration de l’histoire spiritualisée (remarquons la racine commune à ces trois mots), mais un décadentisme rectilinéaire finalement contre-productif.

notes

Collectif, Evola envers et contre tous, Éditions Avatar, coll. « Orientation », 2010, 195 p., 20 €.
« Le traditionalisme de Julius Evola » au « Libre-Journal des enjeux actuels » animé par Arnaud Guyot-Jeannin, Radio Courtoisie, le mardi 28 septembre 2010 de 21 h 30 à 23 h 00.

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