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Dimanche, 14 Août 2011
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Il n’y a pas de formation politique qui puisse être considérée comme héritière de Maurras
Entretien avec Yves Chiron
Histoire :: France
Il n’y a pas de formation politique qui puisse être considérée comme héritière de Maurras
Christian Bouchet : Vous éditez Maurrassiana depuis six années, vous avez auparavant été le Deus ex machina du Bulletin Charles Maurras pendant sept ans (de 1999 à 2005). Par ailleurs, les Éditions BCM que vous dirigez ont publié des ouvrages sur Maurras, sur l’Action Française, ainsi qu’un inédit du Maître (Trois Devoirs). Vous êtes donc un des mieux placés pour nous dire ce qu’il reste, en 2011, de la pensée de Charles Maurras. Qu’en est-il selon vous ?

Yves Chiron : Maurras, pour moi, c’est avant tout une œuvre et Maurras c’est d’abord un écrivain. Bien sûr, il a laissé des écrits politiques de grande importance (Mes idées politiques, l’Enquête sur la monarchie, et bien d’autres livres, souvent de circonstance), mais il y aussi la part prépondérante de la poésie et de la critique littéraire dans sa vie et dans son œuvre. La critique du romantisme par Maurras me semble aussi pertinente et importante que la démonstration de ses « raisons pour la monarchie et contre la République ». Évidemment, si l’on y réfléchit, tout est lié.

C’est pour cela que le Bulletin Charles Maurras - dont la plupart des numéros sont toujours disponibles - et, aujourd’hui, Maurrassiana publient des études qui portent aussi bien sur l’œuvre littéraire de Maurras que sur sa pensée politique, et bien sûr sur l’histoire de l’Action Française.

Il y a toujours à découvrir chez Maurras, dans une œuvre considérable dont Alain de Benoist a dressé la bibliographie complète : Charles Maurras et l’Action Française. Une bibliographie (Editions BCM, 2002).

Que reste-t-il de la pensée de Maurras ? Je répondrai de façon un peu provocante : tout. Comme l’a dit Jean Madiran, n’importe quel livre de Maurras, choisi au hasard, éclaire toujours « par quelque perspective, et toujours par son allure intellectuelle, l’art puissant de sa pensée cheminant : une présence admirable, une présence entraînante ».

S’il fallait désigner trois ou quatre idées centrales, je placerais en premier celle qu’on trouve aux premières pages de Mes idées politiques : l’homme est un héritier, dès sa naissance, et il reste toute sa vie un débiteur. Il reçoit de ses parents la vie et l’éducation, de ses maîtres une formation intellectuelle, de son pays il reçoit un héritage historique, une civilisation. Et, depuis 1789, c’est l’inverse qui est proclamé, promu et érigé en dogme. 1789 c’est la revendication et la contestation permanentes, la remise en cause systématique et perpétuelle. Bref, c’est l’anti-piété familiale, intellectuelle et historique.

La deuxième grande idée maurrassienne, c’est le fameux « empirisme organisateur », qui n’est en rien un pragmatisme mais un sens profond du réel. De la nature, on peut déduire une politique. L’expérience individuelle et l’expérience des peuples et des pays doivent aboutir à la même attitude d’humilité devant le réel. Les idéologues refusent ce réel. La monarchie, chez Maurras, c’est la continuité acceptée de l’histoire de France.

Je retiendrai encore l’idée que « toute tradition est critique ».

Christian Bouchet : Il y a eu de nombreuses études universitaires de qualité consacrées à Maurras, ces dernières années, en particulier celles à l’initiative d’Olivier Dard. Dans le même temps, les héritiers politiques de Maurras, semblent être en voie de disparition totale. Qu’en pensez-vous ? Comment analysez-vous la situation ?

Yves Chiron : Les études universitaires que vous signalez, dont les pôles sont l’université de Lille III et l’université de Mulhouse, sont méritoires et intéressantes et montrent que l’histoire de l’Action française, et de son influence polymorphe, continuent à fasciner les historiens. Mais, vous remarquerez que l’œuvre de Maurras elle-même, dans sa diversité, est beaucoup moins étudiée.

Quant aux « héritiers politiques de Maurras », il faudrait s’entendre sur le mot. L’Action française 2000 est l’héritière, en ligne directe, de L’Action française historique. Il est vrai qu’elle a perdu toute influence réelle. La Nouvelle Action Royaliste, et sa publication Royaliste, qui a rompu avec l’ancienne Action française il y a quarante ans, a rompu aussi avec ses références maurrassiennes. Si Royaliste n’a sans doute guère plus d’abonnés que L’AF 2000 (quelques milliers), la NAR se veut un laboratoire intellectuel, un lieu d’échanges et de débats, qui attirent nombre d’intellectuels de gauche et de républicains. À cet égard, il est significatif que le numéro spécial de Royaliste qui vient de sortir, 40 témoins pour nos 40 ans, passe Maurras par pertes et profits. Parmi les quarante personnalités qui ont répondu à l’invitation de la revue (Régis Debray, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Julliard, Emmanuel Le Roy Ladurie, Emmanuel Todd, etc.), quatre seulement font référence à Maurras et toujours très brièvement et de manière hostile voire caricaturale.

En réalité, il n’y a pas de formation politique ou militante importante en nombre, structurée, agissante et influente, qui puisse être considérée comme héritière politique de Maurras. Dans le combat électoral, il n’y a pas de maurrassiens.

Et je serai tenté de dire que les maurrassiens les plus solides, les plus originaux, les plus vivants, ne peuvent justement pas être qualifiés simplement de maurrassiens. Ils sont plus que cela. Je pense, au premier rang, à Jean Madiran.

Christian Bouchet : De son vivant, Maurras a eu des disciples dans le monde entier, qu’en reste-t-il actuellement ?

Yves Chiron : Cette question rejoint la précédente. Je complèterai donc ma réponse. Un penseur ou un écrivain n’est pas fait pour avoir des « disciples ». Et les vrais « disciples » dépassent le maître, ou deviennent autre chose que la réplique stérile du maître. Sans Socrate, il n’y aurait pas eu Platon, mais Platon est autre chose, et beaucoup plus finalement, que Socrate.

Maurras a sans doute eu des disciples, mais les plus intéressants et les plus doués d’entre eux ont été tout autre chose que des « petits Maurras » ou des « Maurras-bis ». Jean-Marie Le Pen aurait dit un jour que « Madiran était un Maurras gai » (je cite de mémoire). C’est mal connaître Maurras, qui était tout sauf triste. Et c’est réduire Madiran à être une sorte de doublon ou de clone de Maurras. Il est tout autre chose, même si parmi ses matrices, il y a la matrice maurrassienne.

En revanche, loin de Maurras et des « maurrassiens », il y a Jean de France, duc de Vendôme, le petit-fils du comte de Paris, qui incarne une espérance possible, un recours réel. Son livre, Un prince français, ne cite pas une seule fois Maurras. L’a-t-il lu ? Son grand-père, déjà, n’en avait qu’une connaissance superficielle et lointaine. Mais le Prince Jean est maurrassien dans beaucoup de ses analyses et dans son intention.

notes

Bulletin Maurrassiana et Editions BCM : 16 rue du Berry, 36250 NIHERNE. Adresse électronique : chiron.yves@orange.fr.
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