Le souverainisme au Québec ou l’indépendantisme au Québec désigne l’idéologie et le mouvement social qui revendique que le Québec devienne un pays souverain. Le Québec est actuellement l’une des quatre provinces fondatrices de la Confédération canadienne. Selon le souverainisme, la province devrait quitter la Confédération canadienne et devenir un État souverain entièrement indépendant du Canada.L’idéologie souverainiste se fonde sur l’idée que les Québécois forment une nation et ont donc droit à l’autodétermination. Cela s’appuie sur un nombre de particularités historiques, culturelles et linguistiques de la province par rapport au reste du Canada.
L’idéologie souverainiste s’oppose au fédéralisme québécois, puisqu’elle prône la rupture des liens entre le Québec et le Canada. Elle diffère aussi de l’autonomisme québécois puisque celle-ci, bien qu’elle souhaite une décentralisation des pouvoirs, souhaite le maintien du Québec comme province canadienne. Toutefois, plusieurs souverainistes sont aussi en faveur d’une décentralisation.
« Vive le Québec libre ! »
Charles de Gaulle
VOCABULAIRE
En pratique, les termes « indépendantisme », « souverainisme » et « séparatisme » sont utilisés pour qualifier l’idéologie et le mouvement social souverainiste. La différence entre les appellations peut signifier une certaine différence idéologique. L’utilisation du terme « indépendantisme » est souvent employé pour désigner la volonté d’un pays pleinement indépendant, alors que le « souverainisme » inclut aussi des projets d’indépendance partielle à condition qu’ils viennent avec une indépendance légale, c’est-à-dire un droit de retrait illimité. Toutefois, cette distinction est de moins en moins faite, et n’a jamais été reconnue par le camp des opposants. Le terme « souverainisme » est le terme le plus employé de 1968 à nos jours.
Toutefois, l’utilisation du terme « séparatisme » est parfois perçu comme péjoratif au Québec. De plus, la plupart des discours politiques du premier ministre du Canada utilisent le terme « souverainiste » en français afin de modérer les propos auprès de l’électorat québécois et le terme separatist (« séparatiste ») en anglais afin d’accentuer la dimension négative du projet.
JEAN-JACQUES NANTEL
Jean-Jacques Nantel est le cinquième d’une famille montréalaise de neuf enfants. Il provient d’un milieu d’enseignants et de professionnels.
Il a reçu une formation d’ingénieur géologue et de manager à l’École Polytechnique de Montréal et à l’Université McGill.
Pendant des années, Jean-Jacques a oeuvré pour des PMEs québécoises de géophysique tant au Québec qu’à l’étranger et a ensuite été Directeur régional pour l’Asie, l’Afrique et les Caraïbes (32 pays) pour une entreprise privée d’aide au développement international.
Globe-trotter dès son jeune âge, il a entrepris en 1979 un voyage en auto-stop et en solo de deux ans autour de l’Europe et de l’Afrique noire. Au total, Jean-Jacques a vécu quinze ans à l’étranger et visité une centaine de pays sur quatre continents. Il parle couramment quatre langues, dont l’espagnol et le portugais. Il a été marié à une Brésilienne pendant huit ans, a vécu cinq ans au Brésil, où il a été immigrant, et trois ans à l’université de Shanghai en Chine.
Depuis son retour au Québec en 2010, Jean-Jacques s’est impliqué dans une foule d’organisations indépendantistes québécoises dont le Bloc québécois, OUI-Québec et Cap sur l’Indépendance dont il est le trésorier.
Passionné d’histoire et de géopolitique, il a publié sur Amazon (kindle) un livre électronique sur la géopolitique mondiale intitulé ¨Vivre dans un univers qui s’éteint¨. Il est également l’auteur de dizaines d’articles publiés sur Vigile, de nombreux clips radiophoniques et de nombreuses vidéos présentées sur Youtube, principalement sur le sujet de l’indépendance payante du Québec.
* * * HISTORIQUE * * *
LES ORIGINES
Bien avant la naissance du mouvement souverainiste contemporain dans les années 1960, plusieurs mouvements politiques québécois ont eu pour objectif soit l’obtention de l’indépendance politique des Québécois, soit une plus grande autonomie politique pour ces derniers à l’intérieur de l’Empire britannique. Chronologiquement, on peut songer au Mouvement patriote de la première moitié du XIXe siècle, au mouvement autonomiste lancé par Honoré Mercier après l’affaire Riel en 1885, à la motion Francoeur de 1917 ou aux écrits de Lionel Groulx dans les années 1920. Cependant, le fort appui populaire du mouvement souverainiste et la fin des revendications nationalistes et autonomistes traditionnelles est un phénomène qui apparaît un peu après la Seconde Guerre mondiale.
LA DÉCOLONISATION
Les pionniers du mouvement indépendantiste québécois deviennent actifs durant la période dite de la décolonisation, soit de la fin de la Seconde Guerre mondiale au début des années 1960. Durant cette période, plusieurs anciennes colonies européennes, comme le Cameroun, le Congo, le Sénégal, l’Algérie ou la Jamaïque, obtiennent leur indépendance politique.
Les premiers militants de l’indépendance du Québec considéraient le Québec une colonie du Canada fédéral, lui-même un instrument de l’impérialisme britannique. De nombreux activistes furent influencés par les écrits d’auteurs comme Frantz Fanon, Albert Memmi, Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire et Karl Marx. Pour beaucoup, Cuba était le nouvel idéal.
C’est donc un peu avant et pendant la Révolution tranquille que le mouvement indépendantiste se forge des bases populaires, principalement chez les intellectuels de gauche, les étudiants, et les travailleurs. À cette époque, ni les nationalistes traditionnels de l’Union nationale ni ceux du Parti libéral du Québec ne sont partisans de l’indépendance. Malgré des slogans électoraux tels Maîtres chez nous chez les libéraux, et Égalité ou indépendance chez les unionistes, aucun des deux principaux partis n’articule de politique qui va au-delà de simples demandes de réformes constitutionnelles.
La toute première organisation dédiée à l’indépendance du Québec est l’Alliance laurentienne fondée par Raymond Barbeau le 25 janvier 1957. Cette dernière s’oppose à l’impérialisme anglo-saxon, cependant elle est très loin des idées de gauche de l’époque.
Quelque trois ans plus tard, le 9 août 1960, Raoul Roy créait l’Action socialiste pour l’indépendance du Québec (ASIQ).
Vint ensuite le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN), fondé le 10 septembre de la même année.
Le 31 octobre 1962, le Comité de libération nationale, puis en novembre le Réseau de résistance, deux groupes composés de membres du RIN, furent créés pour organiser des actions illégales (mais non-violentes), telles que le vandalisme ou la désobéissance civile.
Peu après l’élection générale du Québec du 14 novembre 1962, le membre du RIN Marcel Chaput fonde le Parti républicain du Québec, qui ne dura cependant pas très longtemps.
En février 1963, le Front de libération du Québec (FLQ) est fondé par trois membres du RIN qui s’étaient rencontrés par le Réseau de résistance. Ils sont Georges Schoeters, Raymond Villeneuve, et Gabriel Hudon. Le projet politique de l’ASIQ, qui associait indépendance et socialisme fut une source importante des idées du Front de libération du Québec (FLQ). C’est cependant Pierre Vallières qui deviendra le porte-parole felquiste le plus médiatisé, surtout après la parution de son récit autobiographique Nègres blancs d’Amérique, qu’il écrit alors qu’il est en prison.
En 1964, sous la présidence de Pierre Bourgault, le RIN devient un parti politique provincial. En 1965, le Ralliement national (RN), plus conservateur que le RIN, devient à son tour un parti.
LA NAISSANCE DU PARTI QUÉBÉCOIS
En octobre 1967, René Lévesque quitte le Parti libéral du Québec suite au refus de la direction du parti de discuter de son projet de souveraineté-association lors de la convention annuelle de 1967. Avec quelques autres libéraux dissidents, Lévesque fonde le Mouvement Souveraineté-Association (MSA) et tente d’unir les divers partisans de la souveraineté, ce que le RIN tente aussi de faire depuis 1960. La fragmentation des forces indépendantistes, leur marginalité relative sur la scène politique québécoise, préoccupait beaucoup certains leaders du mouvement. Lévesque se disait entre autres particulièrement conscient de la nécessité d’offrir une alternative pacifique crédible au FLQ, qui à l’époque prônait la violence et recrutait principalement chez les étudiants.
En 1968, le MSA tient son premier (et dernier) congrès national dans la ville de Québec. Le RN et le MSA s’accordent sur la création du Parti québécois (PQ), mais sans accord formel avec le RIN. Cependant, plus tard dans le mois, Pierre Bourgault, leader du RIN, dissout son parti et invite les membres à se joindre au PQ.
Le 19 septembre 1969, l’économiste et ancien ministre libéral Jacques Parizeau se joint au Parti québécois.
Aux élections générales de 1970, le PQ obtient 23,06 % du vote des électeurs et fait élire sept députés. René Lévesque perd par contre l’élection dans la circonscription de Mont-Royal. C’est le libéral André Marchand qui sera élu.
Aux élections générales de 1973, le PQ obtient 30,22 % du vote des électeurs, un gain de 7,2 % par rapport à l’élection précédente. Même si seulement six députés péquistes iront représenter le parti à l’Assemblée nationale, le PQ forme maintenant l’opposition officielle. La distorsion évidente entre l’appui populaire et le nombre de sièges attribué au parti fera de René Lévesque un ardent promoteur d’une réforme du mode de scrutin.
À sa troisième tentative, le Parti québécois obtient finalement la majorité des sièges à l’Assemblée nationale lors de l’élection du 15 novembre 1976. Avec 41,37 % des voix, le parti envoie 71 députés au Parlement du Québec. Faisant perdre de nombreuses plumes à la fois au Parti libéral du Québec et à l’Union nationale, qui n’obtinrent respectivement que 33,78 % et 18,20 % des voix. La prise du pouvoir sans opposition du PQ altérera la politique québécoise de façon considérable.
En 1977, le PQ passe trois lois d’importance, soit la Loi sur le financement des partis politiques qui met fin à ce qu’on appelait à l’époque les caisses occultes, la Loi sur les consultations populaires qui vint baliser le processus référendaire, et la fameuse loi 101, la Charte de la langue française, la première véritable politique d’aménagement linguistique du Québec. Le 17 mai, le ministre Robert Burns démissionne en affirmant à la presse que, selon lui, le PQ allait perdre son référendum et ne serait pas réélu par la suite.
Lors du septième congrès national du PQ de juin 1979, les membres adoptent leur stratégie référendaire. Le gouvernement débute alors une campagne de promotion de la souveraineté-association. Le gouvernement fait entre autres connaître la nature des relations économiques et politiques souhaités avec le reste du Canada après l’indépendance. Le projet de souveraineté-association finalisée incluait une proposition d’union douanière et monétaire entre le Québec et le Canada.
* * * LE RÉFÉRENDUM DE 1980 * * *
Le référendum de 1980 au Québec est le premier référendum ouvrant la possibilité à l’État québécois de devenir souverain.
En septembre, le PQ crée un comité national des anglophones et un comité de liaison avec les minorités ethniques du Québec, qui ont rejeté le projet péquiste de façon presque unanime. En effet, l’analyse des résultats du vote permet de déceler un clivage important entre la façon de voter des francophones et celle des non-francophones. Malgré l’échec de son référendum, le Parti québécois se pose plutôt en « bon gouvernement » et ne s’engage pas à tenir un référendum lors de son deuxième mandat. Le gouvernement Lévesque étant très populaire, l’électorat le reporte au pouvoir à l’élection 1981 avec une majorité parlementaire plus grande qu’en 1976, et 49,2 % des suffrages exprimés.
Le Contexte
Le référendum de 1980 fut initié par le gouvernement du Québec alors dirigé par René Lévesque, chef du Parti québécois. Lors de la campagne électorale de 1976, René Lévesque avait promis qu’il tiendrait un tel référendum au cours du premier mandat de son gouvernement. En 1979, le gouvernement du Québec fait connaître sa proposition constitutionnelle en publiant un document intitulé La nouvelle entente Québec-Canada. Proposition du gouvernement du Québec pour une entente d’égal à égal: la souveraineté-association. C’est pour honorer cette promesse qu’il a initié le référendum de 1980 même si les sondages lui donnaient alors peu d’espoir d’obtenir la majorité des voix lors de la consultation publique.
LA QUESTION RÉFÉRENDAIRE
La question référendaire était la suivante:
« Le gouvernement du Québec a fait connaître sa proposition d’en arriver, avec le reste du Canada, à une nouvelle entente fondée sur le principe de l’égalité des peuples ; cette entente permettrait au Québec d’acquérir le pouvoir exclusif de faire ses lois, de percevoir ses impôts et d’établir ses relations extérieures, ce qui est la souveraineté, et, en même temps, de maintenir avec le Canada une association économique comportant l’utilisation de la même monnaie ; aucun changement de statut politique résultant de ces négociations ne sera réalisé sans l’accord de la population lors d’un autre référendum ; en conséquence, accordez-vous au gouvernement du Québec le mandat de négocier l’entente proposée entre le Québec et le Canada ? »
Selon certains, le manque de clarté de cette question serait la cause principale de la défaite du Oui. D’un autre côté, plusieurs analystes pensent que, bien qu’une majorité de Québécois étaient alors nationalistes et sympathiques à l’idée de la souveraineté, plusieurs ont voté contre la souveraineté par crainte de l’inconnu, crainte que les adversaires de la souveraineté ont bien exploité durant la campagne référendaire.
Le Résultat
Le référendum a eu lieu le 20 mai 1980 et la proposition d’entamer un processus d’indépendance a été rejeté par 59,56 % des voix exprimés. C’est le soir de ce 20 mai 1980, que René Lévesque déclare son célèbre et prophétique : « Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de nous dire à la prochaine fois ! ».
LE BEAU RISQUE
En politique québécoise, le beau risque est l’idée-clé du gouvernement Lévesque faisant suite à la défaite référendaire de 1980 et au rapatriement de la constitution canadienne, sans l’accord du Québec, par le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau.
LA NAISSANCE DE L’ENTENTE
Lors de l’élection fédérale canadienne de 1984, le Parti québécois s’engagea à soutenir le Parti progressiste-conservateur de Brian Mulroney dans le but de réformer le fédéralisme canadien. Brian Mulroney, chef des Conservateurs depuis le printemps 1983, propose au gouvernement québécois d’entrer dans la constitution canadienne dans « l’honneur et l’enthousiasme ». Le premier ministre du Québec, René Lévesque accepte l’offre de Mulroney et se lance à ses côtés pour les élections fédérales à venir. Ultimement, Brian Mulroney fut élu et le projet put se mettre en branle. Après des rencontres tant à Ottawa qu’à Québec, les deux chefs gouvernementaux s’entendirent sur les bases d’une entente. Le premier ministre québécois devait proposer à ses députés de renvoyer aux calendes grecques la souveraineté en échange de l’entrée du Québec dans la constitution après consensus avec les autres premier-ministres provinciaux. Pour René Lévesque, un important travail de négociation devait s’amorcer.
LA FRONDE S’ORGANISE
Au sein du gouvernement québécois, de mentalité souverainiste, certains députés et ministres influents refusèrent carrément d’aborder quelque association que ce soit avec des forces fédéralistes. Des souverainistes de la première heure comme Jacques Parizeau ou le docteur Camille Laurin n’entendaient pas accepter le projet Lévesque-Mulroney, et ont fait rapidement comprendre à leur chef qu’ils quitteraient le gouvernement si l’entente venait à être ratifiée. De plus, de nombreux députés commencèrent à se réunir en cachette pour planifier une stratégie pour contrer cette entente. Des noms du gouvernement tels que Pauline Marois, Gilbert Paquette ou Guy Chevrette participent alors aux rencontres menées par la députée des Îles-de-la-Madeleine Denise Leblanc-Bantey. En secret, une frange importante du caucus péquiste décide alors d’affronter leur chef sur la question constitutionnelle. Au début novembre 1984, une réunion importante du caucus péquiste a lieu à Québec ou la question du « beau risque » est sur toutes les lèvres. Une partie importante des troupes avec en tête Parizeau, Laurin, Paquette, Léonard et Leblanc-Bantey, font comprendre à René Lévesque que s’associer aux conservateurs et aux fédéralistes mènera à la mort du Parti québécois et de l’option souverainiste. Malgré le message clair que lui lance son caucus, René Lévesque refuse de reculer et avant la conclusion du caucus le chef tranche : tu es pour le beau risque ou tu sors. Le compte à rebours avant l’explosion de la crise est officiellement lancé.
LE GOUVERNEMENT S’EFFONDRE
Le 20 novembre 1984, le député de Deux-Montagnes Pierre De Bellefeuille quitte le caucus péquiste pour siéger comme indépendant. Il part en déclarant qu’il juge impossible de continuer dans un gouvernement qui ne croit plus en son but premier. Le 22 novembre 1984, le gouvernement péquiste éclate. En matinée, le ministre des Transports, Jacques Léonard, démissionne pour protester contre les nouvelles positions du gouvernement. Denise Leblanc-Bantey fait de même quelques minutes plus tard. L’après-midi, deux nouvelles arrivent sur le fil de presse. Le vice premier-ministre et ministre des affaires sociales, Camille Laurin, ainsi que Gilbert Paquette, ministre de la Science et de la Technologie, quittent à leur tour le gouvernement. Le ministre des finances, Jacques Parizeau, numéro deux du gouvernement et véritable pilier, quitte à son tour le cabinet en déclarant que la religion ne peut survivre si le pape perd la foi. Deux jours plus tard, Louise Harel démissionne elle aussi. Denis Lazure, en voyage en Russie, démissionne à son retour. En tout, les troupes péquistes perdent sept ministres et trois députés d’arrière-banc.
Les Conséquences
Le 20 juin 1985, sept mois après la crise du beau risque, René Lévesque, profondément affaibli par la crise qui a secoué son gouvernement et poussé vers la sortie par différents ministres, démissionne comme chef et président du Parti québécois. Le 26 septembre 1985, Pierre-Marc Johnson succède à René Lévesque. Il refuse de remettre la question constitutionnelle sur le tapis. Ce dernier déclenche une élection générale quelques semaines plus tard. Le 2 décembre 1985, le Parti libéral de Robert Bourassa défait le Parti québécois. Maintenant en position de négocier avec un vis-à-vis fédéraliste, Mulroney met sur la table le projet qui deviendra en 1987 l’accord du lac Meech.
* * * L’ACCORD DU LAC MEECH * * *
L’accord du lac Meech est un projet de réforme constitutionnelle négocié en 1987 entre le premier ministre du Canada Brian Mulroney et les premiers ministres des dix provinces canadiennes. Son objectif était de faire adhérer le gouvernement du Québec à la loi constitutionnelle de 1982. Son échec en 1990 est une des raisons d’une hausse du soutien au mouvement souverainiste au Québec.
NÉGOCIATION DE L’ACCORD
L’accord est négocié en 1987 entre Brian Mulroney et les premiers ministres provinciaux à la résidence secondaire officielle du premier ministre, au lac Meech dans les collines de la Gatineau. Les territoires du Yukon et du Nord-Ouest ne participent que par vidéo-conférence.
L’accord comprend cinq point principaux :
– la reconnaissance du Québec comme « société distincte » au sein du Canada ;
– l’élargissement du droit de véto des provinces sur les modifications constitutionnelles ;
– l’élargissement des compétences des provinces en matière d’immigration ;
– le droit pour une province qui choisit de ne pas participer à un programme du gouvernement fédéral d’obtenir une compensation financière ;
– l’obligation pour le gouvernement fédéral de consulter les provinces sur les nominations au Sénat et à la Cour suprême. Brian Mulroney promet par ailleurs d’autres réformes après l’approbation de l’accord.
PROCESSUS DE RATIFICATION ET OPPOSITIONS
Le texte de l’accord prévoit le changement de la formule de modification de la Constitution et tombe ainsi dans le ressort de l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui oblige à l’unanimité du Parlement fédéral et des législatures des provinces dans un délai de trois ans.
L’accord du lac Meech est soutenu par Ed Broadbent, le chef du NPD, et le libéral John Turner, chef de l’opposition officielle. Ce dernier est toutefois dans une position délicate en raison de la position de Pierre Elliott Trudeau. La reine Elisabeth II soutient publiquement l’accord en octobre 1987, une prise de position pour laquelle elle est critiquée.
L’une des oppositions les plus fortes à l’accord du lac Meech vient de l’ancien premier ministre libéral Pierre Elliott Trudeau. Pour lui, Mulroney a cédé face aux provinces et le Québec, bien que distinct, n’est pas plus distinct que d’autres régions du Canada. Cette position de Trudeau est soutenue par certains députés libéraux, fragilisant le leadership de Turner sur le parti.
Le fait que l’accord ait été élaboré par les premiers ministres en réunion close est également l’objet de critiques de la part de mouvements autochtones, de minorités linguistiques dans et hors du Québec, des groupes féministes, etc. Ainsi, bien qu’à sa signature les sondages indiquaient un large soutien en faveur de l’accord, sa popularité diminue notamment dans le Canada anglophone où le statut « spécial » accordé au Québec est mal vu alors que, dans le même temps, l’utilisation par le premier ministre du Québec Robert Bourassa de la clause nonobstant pour appliquer la Charte de la langue française en dépit de l’opposition de la Cour suprême est en outre perçue comme une mesure visant la minorité anglophone de la province.
Ainsi, alors que la date limite d’approbation fixée à 1990 approche, l’impopularité de l’accord du lac Meech en fait un sujet de débats lors d’élections fédérales : le nouveau premier ministre du Nouveau-Brunswick, Frank McKenna, élu en octobre 1987, revient sur la ratification accordée par le précédent gouvernement. Le premier ministre de Terre-Neuve, Clyde Wells fait la même chose quelque temps après. Les tergiversations de certains ministres progressistes-conservateurs du gouvernement de Brian Mulroney, notamment Jean Charest qui propose que des modifications de l’accord aient lieu, provoque le départ du gouvernement de Lucien Bouchard, le ministre de l’environnement qui fondera ensuite le Bloc québécois.
Finalement, 20 jours avant la date limite de ratification, le 3 juin 1990, une conférence des premiers ministres réussit à convaincre toutes les provinces de ratifier l’accord en échange de la promesse de nouvelles négociations, notamment une réforme du Sénat avant le 1er juillet 1995, un garanti de l’égalité femmes-hommes, plus de pouvoirs aux territoires, de nouveaux droits pour les Autochtones et les langues minoritaires.
Toutefois, au Manitoba, l’accord est combattu par des représentants des Premières Nations. Le député Elijah Harper s’oppose à l’examen immédiat de l’accord par l’Assemblée législative, considérant que les Premières Nations n’ont pas été suffisamment impliquées. Un accord est trouvé afin de retarder de trois mois la date limite de ratification, mais l’incident au Manitoba pousse Clyde Wells et le leader de l’opposition de Terre-Neuve, Thomas Rideout à s’entendre pour annuler le vote de ratification de la législature de la province. L’accord du lac Meech échoue alors définitivement.
Conséquences
L’échec de l’accord du lac Meech est durement ressenti au Québec, où il était perçu comme une réponse minimale aux revendications nationalistes de la province. Le premier ministre Robert Bourassa déclare à l’Assemblée nationale du Québec le 22 juin 1990 :
« Le Canada anglais doit comprendre de façon très claire que, quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, le Québec est, aujourd’hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d’assumer son destin et son développement ».
À la suite de l’épisode, le Parti libéral du Québec adopte le rapport Allaire et durcit sa position face au reste du Canada.
La popularité de Brian Mulroney est affectée par l’échec. Dans le cycle de négociations suivant, le gouvernement tâche de solliciter l’avis de la société civile notamment par l’établissement d’un Forum citoyen sur l’unité nationale. Ces efforts aboutissent plus tard à l’accord de Charlottetown qui, contrairement à celui du lac Meech, est soumis à référendum en 1992 mais est rejeté dans la plupart des provinces.
* * * LE RÉFÉRENDUM DE 1995 * * *
Le référendum de 1995 au Québec, tenu le 30 octobre 1995, invitait les Québécois à se prononcer pour une seconde fois, sur la souveraineté au Québec. Le projet fut rejeté par 50,58 % des votants.
Formulée par le parti majoritaire à l’Assemblée nationale, le Parti québécois, la question référendaire de 1995 était :
« Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l’avenir du Québec et de l’entente signée le 12 juin 1995 ? ».
L’entente du 12 juin 1995 sur la tenue du référendum avait été discutée et acceptée par le Parti québécois, le Bloc québécois et l’Action démocratique du Québec. Le texte de l’entente avait été envoyé aux électeurs par la poste durant la campagne référendaire. La loi référendaire indiquait que les négociations avec le Canada et les autres provinces ne devaient pas durer au-delà du 30 octobre 1996, sauf décision de l’Assemblée nationale du Québec.
À 50,58 % des 4,7 millions de votes exprimés (sur un peu plus de 5 millions d’électeurs, soit 93,5 % des électeurs, un taux de participation record au Québec), le résultat a été « non ». L’écart entre le « oui » et le « non » a été de 54 288 voix.
LA CAMPAGNE
Principaux porte-parole du camp du OUI : le premier ministre du Québec et chef du Comité pour le OUI, Jacques Parizeau, le chef du Bloc québécois et Chef de l’Opposition à la Chambre des Communes à Ottawa, Lucien Bouchard, et le chef du parti de l’Action démocratique du Québec, Mario Dumont.
Principaux porte-parole du camp du NON : le chef du Parti libéral du Québec, Chef de l’Opposition à l’Assemblée nationale du Québec et chef du Comité pour le NON, Daniel Johnson, qui sera vite mis de côté au profit du Premier ministre du Canada, Jean Chrétien.
Alors que les sondages montraient une victoire du NON en début de campagne, le camp du OUI montre une forte montée qui sera attribuée par plusieurs commentateurs des médias à la place de plus en plus importante que prend Lucien Bouchard. Les sondages de l’époque démontrent que plusieurs Québécois le considéraient plus charismatique.
Des sondages à partir de la mi-octobre montrent même le OUI majoritaire, ce qui intensifiera la campagne fédéraliste. Jean Chrétien devra alors s’impliquer plus activement dans la campagne. Cette intensification culminera alors que des autobus et des avions seront nolisés afin de rassembler plusieurs milliers de Canadiens de toutes les autres provinces à Montréal le 27 octobre 1995, pour manifester pour un appui au NON et leur « amour pour le Québec ».
Les chroniqueurs politiques restent divisés sur les réelles conséquences de ce rassemblement : certains croient que des tenants du OUI ont été ébranlés par cette manifestation de solidarité et ont été amenés à voter NON, donc que cela aurait directement causé la victoire de cette option ; d’autres croient que plusieurs Québécois l’ont vue comme une intrusion du reste du Canada dans une affaire qui ne concerne qu’eux, ce qui les aurait amené à voter OUI ; finalement, plusieurs considèrent qu’une combinaison de ces effets est possible.
Parmi les arguments des deux camps figurent :
l’importance du Québec dans la Confédération : 1/4 de l’économie, 31 % du PIB, 1/4 de la population, le statut des francophones. Jean Chrétien promet un statut de « société distincte » au Québec. Dans les jours qui précèdent le scrutin, des transferts de capitaux sont signalés, allant du Québec vers l’Ontario. Le dollar canadien baisse face au dollar des États-Unis.
Aux États-Unis, le secrétaire d’État Warren Christopher affirme que les liens commerciaux avec le Canada ne sont pas acquis pour le pays qui succèderait à la Confédération canadienne advenant l’indépendance du Québec.
Les Résultats
Globalement, 50,58 % des électeurs qui se sont déplacés (participation de 4,7 millions sur 5 millions d’inscrits) votent contre le projet de souveraineté.
Pour la première fois, les Québécois francophones donnent un appui majoritaire au projet du mouvement souverainiste avec 60 %2 des votes enregistrés, toute origine ethnique confondue. En 1980, l’appui n’était que de 40 %.
Chez les allophones et encore plus les anglophones, l’appui au OUI est très faible ou nul, tout comme en 1980. Mis à part un appui substantiel venant des communautés haïtienne, sud-américaine, et maghrébine, les non-francophones votent NON.
L’analyse des votes des Autochtones du Québec montrent que les Inuits et les Cris de la Baie James s’opposent majoritairement au projet souverainiste : 95 % de NON ont été enregistrés dans les deux communautés. L’appui est plus élevé chez les membres des autres nations Autochtones qui n’ont pas un territoire à cheval entre la frontière du Québec et de l’Ontario, par exemple les Innus et les Hurons-Wendat.
CONTROVERSE AU SUJET DU DÉROULEMENT DU RÉFÉRENDUM
Peu de temps après le référendum, la controverse éclata au sujet du déroulement de la campagne et de la validité des résultats du scrutin. Durant le référendum, diverses irrégularités furent signalées au Directeur général des élections du Québec (DGEQ), Pierre F. Côté. Après le référendum, celui-ci lancera une enquête pour tenter de faire la lumière sur ces questions.
DÉPENSES DU COMITÉ POUR LE NON
La Loi référendaire québécoise indique que toutes les dépenses doivent être autorisées et comptabilisées par les comités du OUI et du NON après le dépôt du décret enclenchant la campagne. En 1995, les comités du OUI et du NON avaient chacun un budget autorisé de 5 millions de dollars canadiens. Une dépense effectuée par toute personne ou groupe autre que les comités officiels est illégale après le décret. Toute personne enfreignant cette loi est passible d’une amende allant jusqu’à 30 000 $. Le non-paiement de l’amende peut mener à l’emprisonnement. La Loi référendaire québécoise a été adoptée par l’Assemblée nationale du Québec quelque trois ans avant le référendum de 1980. Cependant les attraits de cette loi qui s’applique au dépenses fait hors de la province fut déclaré non constitutionnelle par la Cour suprême du Canada en 1997.
Le rapport Grenier mis en place par le DGEQ, a publié ses conclusions sur les dépassement de coûts des dépenses du comité du Non le 29 mai 2007. M. Grenier a fait état d’un montant d’environ 539 000$ qui furent dépensés illégalement durant la période référendaire.
OPTION CANADA
Option Canada est un organisme semi-clandestin, financé par le gouvernement du Canada par le Conseil de l’unité canadienne, qui a participé au financement du camp du Non lors du référendum de 1995 au Québec. Fondé le 7 septembre 1995, quelque huit semaines avant le référendum pour la souveraineté du Québec, il fut dissous quelques mois plus tard. Des agissements ont été faits en contravention de différentes lois québécoises et plusieurs décideurs font partie des personnes accusées d’avoir participé au scandale des commandites.
Contexte
Au moment de ses agissements, le groupe était composé de différents hommes d’affaires et organisateurs politiques de trois partis politiques fédéralistes : Le Parti libéral du Canada, le Parti libéral du Québec et le Parti progressiste-conservateur du Canada. Le président d’Option Canada était Claude Dauphin, un proche collaborateur de Paul Martin lorsqu’il était ministre des Finances et actuellement maire de l’arrondissement de Lachine depuis 2001.
Option Canada a attiré l’attention du public quand il a créé un comité pour enregistrer les électeurs hors Québec. Il aidait les citoyens ayant quitté le Québec moins de deux ans avant le référendum et qui estimaient possiblement revenir au Québec prochainement, à obtenir le droit de vote lors du référendum. Depuis 1989, une clause de la loi électorale du Québec le permettait. Le comité, qui opérait durant la campagne référendaire, distribuait des dépliants qui incluaient le formulaire à remplir pour se prévaloir de cette particularité. Le dépliant donnait aussi un numéro de téléphone sans frais pour obtenir plus d’information, qui était le même que celui du Conseil de l’unité canadienne.
Après le référendum, le Directeur des élections du Québec, Pierre F. Côté, a accusé Option Canada d’avoir violé les lois québécoises et a ouvert une enquête. Par contre, le 17 octobre 1997, la Cour suprême du Canada a jugé que certaines clauses électorales québécoises étaient inconstitutionnelles. Le Directeur des élections du Québec n’a eu d’autre choix que d’abandonner les chefs d’accusation.
LE SCANDALE DES COMMANDITES
Le scandale des commandites est une affaire politique canadienne relative à l’usage de fonds publics pour financer diverses opérations de relations publiques visant à contrecarrer les actions du Parti québécois en faveur de la souveraineté du Québec. Dans la perspective de sensibiliser l’opinion publique québécoise sur les actions positives du gouvernement fédéral canadien dans la province du Québec, d’importants contrats ont été signés avec des agences publicitaires. Mais l’usage des sommes allouées, l’efficacité de la campagne et le montant des contrats n’ont pas fait l’objet d’évaluations et de contrôles stricts.
L’implication du Parti libéral du Canada, au pouvoir de 1993 à 2006, est importante dans cette affaire qui se déroula de 1997 à 2003. Les fonds publics investis ont été évalués en 2005 à 332 millions CAD.
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