
Le piège à cons canadien
L’extrême-gauche, avec son habituel lyrisme, a une façon catégorique de qualifier le processus électoral : « élections, piège à cons ». D’un point de vue nationaliste, le slogan est simpliste et ne s’applique pas nécessairement à toutes les situations, particulièrement en Europe où des partis nationalistes se présentent dans la plupart des élections. Mais au Canada, c’est on ne peut plus vrai : les identitaires n’ont nulle attache partisane et sont carrément orphelins. La présente élection offre différentes versions du statu quo, mais aucun gain envisageable.
Tout dernièrement, Justin Trudeau déclenchait des élections fédérales pour tenter d’obtenir une majorité parlementaire. À mi-mandat, il s’agit calcul cynique : des milliards de dollars ont été octroyés plus que généreusement à tout un chacun et ces programmes prennent fin à la fin de septembre, soit une dizaine de jours après le scrutin. Après la fête, la facture. Et elle risque d’être salée. Il faut s’attendre à des coupes de service et des augmentations de taxes substantielles dès octobre, d’où une élection anticipée. Trudeau s’est toujours gardé de parler des coûts de sa gestion qui était déjà déficitaire avant la pandémie. Son approche de la covid a coûté plus de 491 milliards de dollars, ce qui représente plus du cinquième du PIB.
Avec le système parlementaire unilatéral à un tour, chaque comté élit un député, celui ayant remporté le plus de voix. On pourrait ainsi avoir un gouvernement entièrement libéral, avec 100% des sièges, si avec les courses à quatre, les Libéraux emportaient tous les sièges avec des 26%, face à des concurrents n’obtenant que 25% chaque, faisant en sorte que ces partis ne seraient pas représentés au Parlement. Cette situation est évidemment théorique, mais cela explique qu’il y a un monde de différence entre le nombre de votes reçus sur l’ensemble du pays versus le nombre de députés. Le chef conservateur Andrew Scheer avait d’ailleurs récolté plus de votes que Trudeau qui obtint toutefois plus de sièges que son opposant.
Les élections canadiennes offrent donc quatre scénarios possibles, un gouvernement minoritaire ou majoritaire, libéral ou conservateur. À court terme, ce sont les seules possibilités réalistes, surtout du fait que le Nouveau parti démocratique (gauche) n’a que peu de chances de se hisser en seconde place. Le Bloc québécois, quatrième formation du pays, représente un vote de protestation du Québec, mais politiquement parlant, il professe grosso modo les mêmes idées que le Parti libéral de Justin Trudeau, tout en mettant de l’avant les spécificités québécoises.
Que faire donc?
Les conservateurs et les libéraux, au coude à coude dans les sondages, ont un programme assez semblable et si ce n’était du petit logo apposé sur les programmes, ceux-ci seraient indifférenciables. Les nationalistes n’ont donc rien à gagner à supporter l’une de ces formations, tout comme ils n’y a rien à attendre du Bloc québécois.
Il y a toutefois deux formations politiques qui présentent un certain intérêt : le Parti nordique de Derek Sloan, plutôt de droite conservatrice, et le Parti populaire de Maxime Bernier, une formation libertarienne se voulant populiste.
Aucune de ces deux offres ne défend une vision réellement nationaliste. Les deux ont une vision entièrement civique de la nationalité et s’ils récusent ouvertement le politiquement correct, ils ne franchissent jamais la ligne rouge, non par peur ou par pragmatisme, mais simplement, car leurs idéaux ne divergent pas des dogmes convenus.
Les Canadiens peuvent donc opter pour l’une de ces deux options, tout en gardant en tête qu’il s’agit d’abord et avant tout d’un vote de protestation. Quant à s’impliquer activement dans ces formations? Il y a peut-être des façons plus fructueuses de militer.