Je considère le site Metamag comme Ami de Voxnr. C'est là conséquence de deux raisons principales : d'une part, l'orientation politique, au sens le plus large, de ce site est assez proche de celui de Voxnr. D'autre part, force est de reconnaître que Metamag propose au lectorat quantité et surtout qualité par l'intermédiaire d'articles, avec lesquels tous ne seront pas en accord, mais qui sont presque toujours très riches. Ils sont plusieurs hommes à alimenter ce site, avec chacun son style et sa spécificité politique.
Michel Lhomme est l'un deux. Le lectorat de Voxnr connaît cet écrivain puisque, bien souvent, nous reprenons ses articles, afin que tous puissent bénéficier de son éclairage. A titre d'exemple :
Quand les antiracistes détestent les Noirs
Plaidoyer pour une grande Europe - Réponse à des amis sur le problème Ukrainien
Ukraine : Vers la guerre totale : Le monde est en train de basculer
Livre : Parution : Les Anarchistes. Dictionnaire biographique du mouvement libertaire francophone
11 Novembre 2014 et le centenaire de 14-18 : Comme en 14, l'armée est nue et les généraux se taisent
Ce ne sont là que cinq exemples parmi les 39 articles de Michel Lhomme que Voxnr a mis en ligne.
Or, raison de ma prose aujourd'hui - je viens de lire son dernier article, intitulé,
« Le rassemblement, bleu ou rose Marine ? Comment un parti d'opposition radicale devient un parti conformiste »
et je tenais à faire part de quelques unes de mes réflexions sur le sujet.
1/ Le plus souvent, la réponse à une question d'importance n'est ni blanche, ni noire. Croire qu'elle serait d'une nuance particulière de gris m'apparaît aussi erronée dans la majorité des cas. A titre d'exemple, s'il est un sujet dont on se préoccupe beaucoup dans les milieux qualifiés, à tort ou à raison, d'intellectuels, notamment durant les trois dernières décennies, c'est bien le fascisme et ses interprétations. Ces dernières sont nombreuses, mais il en est trois qui dominent. Celle – communiste – qui fait du fascisme le bras armé d'un Capital radicalisé, effaré par la poussée communiste. Celle – socialisante – qui explique le fascisme en fonction de l'histoire spécifique de certains pays dans lesquels le fascisme a pu vaincre. Celle – libérale – qui considère le fascisme comme un objet spatio-temporel, qui a existé à une période donnée de l'histoire, mais qui, pour prendre un exemple, un peu comme la féodalité, fut et ne sera plus. Bien souvent, et c'est très malheureusement de façon très nette en politique, chacun se cramponne à son point de vue, vantant sa thèse, et bien sur dénigrant les autres.
Pourquoi, au contraire, ne pas accepter les trois thèses ? Cela ne signifierait pas, du tout, qu'elles auraient la même valeur. Mais que chacune d'entre elles, simultanément aux autres, serait valide.
Après tout, la thèse, quand bien même communiste – je sais m'adresser très majoritairement à des anticommunistes – n'est en elle même nullement contestable. En effet, qu'il y eut des Allemands et beaucoup, mais aussi des grandes entreprises (on songe à l'exemple emblématique d'IG Farben) préférant Hitler à Staline, cela ne fait aucun doute.
De même, la seconde thèse, à savoir considérer que l'histoire nationale explique la victoire du fascisme dans certains pays et son échec dans d'autres me semble également légitime. On ne peut en effet qu'être surpris de l'imperméabilité des pays protestants (l'Allemagne n'est pas protestante mais bi-religieuse) au fascisme. La crise de 1929 toucha, aussi bien, et de manière intense Usa et Royaume-Uni, sans que le fascisme n'y puisse prospérer, réduit au simple aspect groupusculaire. Rappelons aussi qu'au nord de l'Europe (protestante donc), il n'y eut pas d'adhésion massive au fascisme.
Quant à la troisième thèse, encore une fois il en existe d'autres que les trois présentées, elle semble valide au même titre que les deux autres. Quand bien même nous serine tant et tant que « le ventre est encore fait con », que depuis 1945, le fascisme n'est plus, si ce n'est sous une forme résiduelle.
En conséquence, ces trois thèses sont valides simultanément et ne s'opposent pas. Au même titre que la première guerre mondiale (militarisation des esprits et de la société civile) a très probablement joué un rôle majeur. Au même titre que le passage d'une société agricole à une société industrielle avec ce qu'elle implique comme mue psychologique déstabilisante et traumatisante.
On a beau vouloir tenter de faire de l'histoire une science que , tant qu'il n'y aura pas d'écriture alphanumérique comme en mathématique ou en physique, on n'y parviendra pas. On aura beau tenter de faire de l'histoire une science que, tant que les historiens n'auront pas l'obligatoire honnêteté intellectuelle des scientifiques propre à leur discipline, on n'y parviendra pas. En effet, il ne viendrait pas à l'idée d'un scientifique de modifier à sa manière les équations fondamentales de l'aérodynamique, sous peine de voir le nouvel avion créé ne pas décoller. Un matheux ne peut annoncer une réponse fausse à une équation sous peine de se trouver ridicule devant ses pairs. Ce que l'on a appelé « catastrophe ultra-violette » en épistémologie, a été la conséquence de certains relevés numériques, contestant la grande thèse initiale, admise pourtant de tous ou presque. Il a donc fallu, nécessairement, revoir cette dernière. Un historien eut, probablement, à la place des scientifiques, discrètement dissimulés les quelques résultats atypiques sous le tapis, protégeant ainsi le dogme, mais aussi handicapant la lumière.
Après tout, chacun a déjà entendu des discussions politiques, et on m'accordera bien volontiers que c'est là un sujet où la mauvaise foi ou le mensonge s'épanouissent très bien. Dommage …
2/ Si j'ai consacré autant de lignes à la première partie, c'est parce qu'elle me semble essentielle. La vérité présente le plus souvent plusieurs facettes et elle nécessite beaucoup d'honnêteté mais aussi d'humilité.
Pas un hasard si j'ai abordé le problème du fascisme et de ses interprétations. « On » (1) a dit que le Front National était fasciste et certains perdurent dans l'affirmation. Ce malgré, par exemple, le point de vue éclairé de René Rémond, meilleur spécialiste en son temps de la droite.
Or, je ne pense pas me tromper, en affirmant que l'article de Michel Lhomme, pose le problème de l'involution récente du Front National caractérisée par le terme de dédiabolisation. Se pose donc la question, dans
les mots très facile à définir, de savoir si le Front National a changé ou, pour reprendre l'expression, si le Front National est « un parti comme les autres. »
3/ Sachant 1/ et 2/ je ne m'imagine pas répondre à cette question par un Oui ou un Non définitifs. « Volonté d'avoir raison, marque d'esprit vulgaire. » Camus , Réponse à Nietzsche « Un oui, un non, une ligne droite, un but. ».
4/ Un front est un front. Qu'est-ce dans les faits ? Une coalition d'éléments distincts, non point animés par le même souhait (loin de là pour le sujet qui nous préoccupe), mais par la même détestation. Certains fustigent ce qu'ils appellent le marinisme, responsable de la dédiabolisation. C'est avoir la mémoire un peu courte. Le Front National, cessa d'être une véritable coalition, après l'attentat perpétré contre François Duprat. Non pas qu'il n'existât plus à l'époque d'éléments franchement atypiques au sein du Front, mais qu'ils ne furent plus organisés sous forme de tendance. C'est donc après la mort de François Duprat, que le Front National devint le mouvement lepeniste de Jean-Marie. Un Jmlp qui, justement, apparaissait lors de la création du Front National, comme un modéré qu'il fut le plus souvent, au milieu de radicaux.
« Cependant, comme le soulignent Nicolas Lebourg et Jonathan Preda, « plus jamais le néo-fascisme français ne parviendra à tenir la rue et faire l’actualité comme au temps d'Ordre Nouveau. Alors que les nationalistes [révolutionnaires] étaient persuadés qu'il fallait un parti monolithique de révolutionnaires professionnels pour ressusciter l'extrême droite française, c’est finalement le national Jean-Marie Le Pen, seul maître du Front National après l’été 1973, qui sera en position de relever ce défi » (2)
Ainsi donc, s'il y a involution au sein du Front, elle n'est nullement récente. On peut aussi rappeler la naissance du Pfn, justement extérieur au Front, par des militants du Front. Pas un hasard si d'ailleurs Jmlp qualifie le Front National de mouvement (dynamique) refusant le terme de parti (statique). Un aspect semble donc certain, c'est que le Front National en 1984, année où il devint connu, est, avant tout, le mouvement de Jean-Marie le Pen, ce qui contredit l'idée d'une coalition, donc d'un front disposant, par exemple, d'une direction collégiale.
5/ Simple parenthèse, mais qui mérite d'être ouverte, je ne vois pas en quoi l'homosexualité de Florian Philippot, suffit à faire du Front National, un parti comme les autres ou pas. Le fait apparaît comme tellement dérisoire par rapport aux choix géopolitiques ou économiques, qu'il pèse bien peu. Là encore, fidèle à l'idée principale défendue dans le 1/, je ne rejette pas le fait puisque, en tant que fait justement, il est en prendre en compte. Il n'en reste pas moins qu'il est des plus mineurs. J'imagine très bien, ce que cette homosexualité peut déclencher comme sentiments chez les intégristes catholiques. Encore faudrait-il disposer d'études socio-religieuses sérieuses afin de savoir qu'elle est la proportion d'intégristes au sein du Front. Il me semble – encore une fois j'attends et espère l'étude objective – que les intégristes catholiques, tout au moins en partie, ont quitté le Front voilà bien longtemps. Si le Front national ne s'est pas mobilisé lors des manifestations de ce que l'on a appelé le mariage pour tous, c'est parce qu'il considérait que c'était là problème mineur – c'est bien ce qu'indique l'expérience des pays ayant légalisé le mariage homo – mis en exergue pour masquer l'échec flagrant du gouvernement dans des domaines autrement plus importants, mais aussi de ne pas s'associer à la droite qui ne manifestait que pour se refaire une santé après le duel fratricide Copé-Fillon.
6/ Au sujet des absences locales de Florian Philippot, cela n'a rien de surprenant. On imagine bien que le maire d'un village est autrement plus présent sur place que ne l'est un député-maire, surtout lorsque ce dernier occupe au sein de son mouvement un poste majeur. Très fréquemment sollicité, Florian Philippot se doit d'être donc un grand voyageur, dans l'hexagone comme à l'étranger, et ainsi être moins présent dans sa contrée d'élection.
7/ Le Front National est un mouvement jeune. Inconnu du grand public durant sa première décennie d'existence, il n'a que trente ans d'existence politique réelle. A titre d'exemple comparatif , l'Ump vient en partie du Rpr qui vient de l'Udr qui vient de l'Unr … Autrement exprimé, le Front National, contrairement à ses concurrents (que l'on songe aussi au Ps ou au Pc), se doit de se structurer encore aujourd'hui. De plus, il faut bien admettre qu'aujourd'hui encore, l'étiquette « Front National » est difficile à porter, sachant le terrorisme intellectuel ambiant. On ne maille pas un pays de 500 000 km2 si facilement : il faut du temps, mais aussi des habitudes et réflexes qu'il faut inculquer à des militants, bien souvent néophyte en politique. On comprendra dès lors le pourquoi de l'action de la direction du parti, évidemment pyramidale.
8/ Il ne manque pas d'articles consacré au Front National, aussi bien sur la toile que dans les journaux et revues. Deux tactiques sont alors utilisées pour déconsidérer le Front National. La première, la plus utilisée et ce dès l'origine, consiste à affirmer que le Front est radicalement différent (détestable bien sur) des autres structures. La seconde, plus récente mais de plus en plus importante, consiste justement à affirmer très exactement le contraire. Ce de façon à faire passer le vote au profit du Front pour une impasse, incitant ainsi le corps électoral sensible aux thèses du Front, à aller à la pêche le jour du scrutin. Néfaste donc à mes yeux, d'aller apporter notre soutien, nous qui sommes favorables à l'alternative, à ces malfaisants.
9/ Le Front National en tant qu'il est comme les autres partis.
Il accepte comme les autres les règles du jeu démocratique.
Il dispose d'élections internes ( on pourrait de la même façon écrire que ce qui le rend différent, c'est qu'il n'y a pas de trace de magouille – voir à contrario Ps, Udi, Ump).
On s'accorde à reconnaître en son sein des électorats différents (Front du Sud, Front du Nord) (Libéraux, anti-libéraux)
10/ Le Front National en tant qu'il est différent des autres partis.
Il prône l'intervention de l'Etat dans l'économie, notamment par le biais du protectionnisme, ce en opposition totale avec la pensée du moment (toujours plus de libéralisme, ce depuis très longtemps).
Alors que la politique d'immigration est consensuelle depuis plusieurs décennies, le Front National propose une alternative.
Le Front National s'oppose aux communautarismes, et par voie de conséquence célèbre la Nation.
Le Front national, d'un point de vue géopolitique et diplomatique, propos un renversement d'alliance (Russophilie au milieu d'un concert russophobes)
Le Front National est républicain, esseulé sachant que les autres partis adhèrent à la démocratie libérale.
Ce n'est donc pas dans des domaines anodins que le Front National se distingue des autres partis. Que ce soit sur l'Economie ou la diplomatie, la voix – voie – frontiste est des plus atypiques au sein du paysage politique français. C'est avec une autre conception de l'Economie que l'on peut faire une autre politique et chacun le sait. Pas un hasard si économiquement aujourd'hui, droite et gauche, soient si similaires. Et que, relation de cause à effet, les politiques menées par les uns et les autres, soient les mêmes, ce dont de plus en plus de Français ont conscience. Français qui, eux aussi, sont nombreux, à considérer que le vrai « changement » passe par le Front National. Et ce n'est pas là, fait du hasard …